Il ne se passe pas d’année sans que l’Etat malien ne rectifie son budget. Après la rectification du budget de 2014 pour la prise en charge des dépenses de l’avion présidentiel et bien d’autres, cette année, le gouvernement a initié un projet de loi de finance rectificative le 13 mai dernier pour la prise en charges de certaines dépenses supplémentaires dont 88,6 milliards de FCFA pour la prise en compte de la loi de programmation militaire, 24 milliards de FCFA pour faire face aux doléances de l’UNTM, 11,4 milliards de FCFA pour la mise en œuvre de l’Accord de paix, 3 milliards de FCFA pour l’organisation du sommet Afrique-France etc.
La dite loi était soumise a l’approbation des honorables députés qui ont adopté hier jeudi 25 juin 2015, à la majorité des 115 voix pour, 21 députés de l’opposition ont voté contre et zéro abstention. La séance plénière qui a eu lieu dans la salle Modibo Keïta de l’Assemblée nationale était présidée par le président de l’hémicycle, Issaka Sidibé en présence du ministre de l’économie et des finances, Mamadou Igor Diarra et d’autres personnalités.
Les députés ont adopté hier le projet de loi portant modification de la loi de finances rectificative du 13 mai 2015. Les dépenses de la loi de Finances rectificative se chiffrent à 1 881,168 milliards de FCFA pour des ressources de 1 757,296 milliards de FCFA, soit un déficit de 123,872 milliards de FCFA contre 70,920 milliards de FCFA prévus au budget initial.
La couverture de ce déficit sera assurée par les aides budgétaires extérieures et les titres d’emprunts émis par le trésor, a dit le rapporteur de la commission des finances, de l’économie, du plan et de la promotion du secteur privé, Yacouba Michel Koné. Avant d’ajouter que les nouvelles inscriptions des dépenses portent essentiellement sur l’incidence de la loi d’orientation et de programmation militaire de 88,6 milliards de FCFA, l’incidence protocole UNTM de 24 milliards de FCFA, l’incidence de l’accord de paix de 11,4 milliards, les crédits du ministère de la défense et des anciens combattants de 5 milliards de FCFA, l’apurement des dettes fournisseurs antérieures à 2014 de 12 milliards de FCFA, le rachat des actions du groupe Agakan détenues à EDM pour 7,5 milliards de FCFA, l’achat des actions BCEAO détenues à la BDM pour 1,5 milliard de FCFA, le remboursement des crédits TVA du solde 2014 pour 26,3 milliards de FCFA, une inscription supplémentaire pour l’organisation du sommet Afrique-France à hauteur de 3 milliards de FCFA et bien d’autres dépenses dont le montant s’élève à 212,778 FCFA. Aux dires du rapporteur, depuis la fin de l’année 2014, le gouvernement travaille à un retour de la confiance avec les partenaires techniques et financiers (Ptf).
Cela a abouti, poursuit-il, à des décaissements d’appuis budgétaires courant premier trimestre de 2015, d’un montant de 61,006 milliards de FCFA. A l’en croire, Les recettes du budget d’Etat rectifié 2015 s’élèvent à 1 757,296 milliards de FCFA contre 1 714,532 milliards de FCFA prévus dans le budget initial 2015, soit une augmentation de 42,764 milliards de FCFA ou un taux de progression de 2,49%. Selon Yacouba M Koné, les déplacements et missions représentent 2,57% des charges du budget d’Etat. Ils ont augmenté de 7,318 milliards de FCFA en passant de 41,012 milliards dans le budget initial à 48,330 milliards de FCFA au budget rectifié, soit un taux de progression de 17,84%, a-t-il dit. Il a fait savoir que l’article 13 de ladite loi autorise le ministre chargé des finances à émettre des titres d’emprunts d’Etat à hauteur d’un montant qui ne peut en aucun cas excéder 123 872 258 000 FCFA.
En outre, le rapporteur a indiqué que l’audition des personnes ressources s’est focalisée sur les efforts des services d’assiette pour améliorer les recettes fiscales, la réforme pour améliorer le rendement fiscal du secteur informel, les mesures envisagées dans le cadre de la maîtrise des exonérations, les problèmes liés à l’exécution du BSI (financement extérieur), et enfin les mesures envisagées pour améliorer le ration des dotations des 8 régions et du district de Bamako (actuellement 13,93% des charges du collectif).
Les recommandations faites par la commission saisie au fond sont entres autres : la poursuite des efforts de mise en confiance des PTF et de la rigueur dans la gestion des finances publiques ; la redynamisation de l’exécution du BSI (financement extérieur), moteur de développement pour le pays et la poursuite de l’identification des secteurs sous-imposés de l’économie nationale pour une meilleure justice fiscale.
Lors des débats, l’honorable Kalilou Ouattara a invité le gouvernement de réorienter ses dépenses tout en affirmant que l’effort de guerre doit être amoindri dans la mesure où l’accord de paix vient d’être signé. Avant de dénoncer la réduction du budget alloué à la santé. En outre, il a souhaité une taxe foncière afin de booster les caisses de l’Etat. Il a également invité le ministre de récupérer les 153 milliards de FCFA épinglés par le vérificateur général.
L’opposition rejette le collectif budgétaire
«A travers ce collectif budgétaire, le gouvernement prend enfin en compte certaines de nos préoccupations évoquées au moment de l’adoption du budget initial, à savoir : les engagements pris avec l’UNTM et le renforcement des moyens des forces armées. Cependant, force est de constater que le projet de budget rectifié s’inscrit dans la continuité d’une politique budgétaire frileuse, incapable d’insuffler des signes d’une véritable reprise économique, garante d’une croissance soutenue et de la création effective d’emplois », c’est ce qu’a déclaré Alkaïdi M Touré du groupe Vigilance Républicaine démocratique (VRD) qui anime l’opposition parlementaire.
Pour lui, le renoncement à la construction du pavillon présidentiel à l’aéroport pour appuyer la sécurité n’est certainement pas à l’ordre du jour du gouvernement et au surplus, a-t-il poursuivit, trois nouveaux milliards FCFA sont encore mis à la disposition de l’organisation du sommet Afrique-France.
Le groupe VRD, présidé par l’honorable Mody N’Diaye constate que le niveau de l’agriculture dans le budget est de 13,8% en régression de 0,38% par rapport à son niveau dans le budget initial. Dans tous le cas, indique les membres du groupe, depuis l’annonce présidentielle en 2014 d’affecter 15% du budget d’Etat à l’agriculture, le gouvernement n’a pas encore pu mettre cela en œuvre. « En conclusion, le groupe VRD note une volonté du gouvernement de présenter un budget réaliste.
Toutefois, les choix fiscaux ne sont pas ceux adaptés à la relance de notre économie. Concernant les dépenses, certaines sont encore peu rationnelles. Sous le bénéfice de ces remarques et suggestions, le groupe VRD ne donne pas son quitus au présent projet de budget rectifié 2015 », a conclu Alkaïdi. Pour sa part, le ministre Mamadou Igor Diarra a rassuré que le budget rectifié prend en compte le bien être de la population. Avant d’ajouter qu’il y a des mesures prises pour l’accroissement de la population agricole, la mise en œuvre de l’accord etc. «Nous sommes sur la bonne trajectoire en matière de recette douanière.
Et compte tenu de l’étendu du territoire, le Mali doit investir dans sa sécurité. Beaucoup d’investissement sont en cours dans le domaine de la santé », a-t-il dit. Pour le ministre, le secret de tout développement repose sur la production. Enfin, il s’est engagé à affecter des délégués de contrôle financier auprès de toutes les institutions de la République y compris la présidence. Malgré cette désapprobation de l’opposition, la loi fut finalement voté à 115 voix pour, 21 contre et zéro abstention.
Aguibou Sogodogo