Ayant usé de son influence pour permettre à un des fournisseurs d’engrais de s’adjuger une part importante de ce marché, qui pèse plus de 59 milliards CFA, ce Seigneur, pardon ce Saigneur de la Rue publique aurait empoché 100 millions CFA de pots-de vin. Un petit acompte, en attendant la conclusion du marché. Mais ce qui devrait arriver, arriva !
Il est puissant. Très puissant. Trop puissant. Membre de la majorité « pestilentielle », il a la haute main sur toutes les grandes affaires de la nation. Sur tous les marchés publics. Même les négociations politiques, qui ne semblent pas relever de son ressort. Partout, il impose ses choix. Sans rencontrer la moindre résistance. Tout le monde, ou presque, se couche de lui, y compris des membres du gouvernement.
Notre Saigneur de la Rue publique, puisque c’est de lui qu’il s’agit, vient d’être cité dans l’affaire dite des « engrais frelatés ». Fort de son influence, dans le cercle du pouvoir, il aurait été sollicité par un fournisseur d’engrais de la place. Objectif : l’aider à remporter l’appel d’offres, portant sur la fourniture des engrais minéraux en zone CMDT / OHVN. Sitôt dit, sitôt conclu.
Fort de son influence, il prend attache avec tous les services concernés par la mise en œuvre de cet appel d’offres. A commencer par le GIE- UN SCPC/CMDT/OHVN, piloté par le Gentlemen farmer : Bakary Togola.
Selon nos informations, notre Saigneur de la Rue publique serait allé voir le Premier ministre en personne, pour lui proposer d’attribuer le marché des engrais à son fournisseur. Refus poli du chef du gouvernement, qui lui aurait rappelé qu’il « n’est pas là pour gérer des affaires personnelles ; mais pour la collectivité ». Avant de prendre congé de lui.
Loin de se décourager, notre Saigneur de la Rue publique multiplie les démarches auprès des GIE, chargés de recenser les soumissionnaires et le dépouillement des offres. Résultat : son fournisseur à lui n’a pas réussi à s’adjuger toutes les offres, soumises à concurrence ; mais une bonne part, qui n’a pas manqué de susciter la jalousie de ses concurrents. Le même fournisseur d’engrais se serait vu, aussi, le marché des tracteurs estimé à plusieurs dizaines de milliards de nos francs.
Pour le remercier notre Saigneur de la Rue publique pour son coup de pouce, il lui aurait versé la bagatelle de 100 millions CFA, en attendant la conclusion du marché. Mais ce qui devrait arriver, arriva.
Le scandale éclate, notre Saigneur de la Rue publique retourne les 100 millions CFA à son protégé
Dans un premier document, intitulé « Mémorandum NPKSB SOMADECO : impact sur les rendements de coton malien », les engrais fournis seraient de piètre qualité, y compris ceux livrés par le protégé du « Calife à la place du Calife ». Ce document fait l’effet d’un coup de tonnerre dans un ciel bleu. C’est le « chauve-qui peut» dans le cercle fermé des fournisseurs d’engrais. Chacun y va de son commentaire. Friande de scandale, la presse s’en mêle.
Selon ce document, élaboré par un fournisseur-dénonciateur, l’impact de la mauvaise qualité de l’engrais fourni par son concurrent est négatif sur les rendements de la campagne agricole. Il l’estime à, environ, 40 à 50 % de perte à l’hectare. Soit une perte, estimée à 130.000 tonnes. Soit, l’équivalent de 40 milliards CFA.
De son côté, le ministre du Développement Rural, Bocari Tréta, instruit aux services spécialisés de procéder à des vérifications physico-chimiques sur les engrais livrés par les fournisseurs. Les résultats donnent le tournis. Si l’analyse physique des engrais aura été concluants (car sur les 4.757 tonnes, aucun sac ne pèse moins de 49,5 kg), il en est autrement de l’analyse chimique des engrais. L’analyse des 73 échantillons a prouvé que 2.093 tonnes d’engrais sont hors normes. Soit 44 % du stock.
En proie à la panique, surtout après la tournure judiciaire prise par cette affaire, notre Saigneur de la Rue publique se convainc de retourner, à son protégé, les 100 millions CFA que ce dernier lui aurait versé. Du moins, si l’on en croit nos sources.
Aux dernières nouvelles, il aurait, déjà, commencé à rembourser cette somme. Sans autre précision.
Affaire à suivre donc !
Oumar Babi