C’est la troisième fois que le ministre de la Sécurité et de la protection civile, Sada Samaké est interpellé par le député Oumar Mariko, en l’espace de trois mois, pour apporter des réponses à certaines préoccupations de dimension nationale. Il s’agit de l’insécurité, la pénurie de cartes d’identité, de passeports et la situation des élèves commissaires et autres syndicalistes de la police.
Un ministre incapable d’apporter des réponses satisfaisantes et un député qui ne veut rien lâcher. Voilà le contexte tendu dans lequel le président Saint-Isaac devait assurer la police des débats de ce jeudi matin 2 juillet 2015, lors des séances des questions orales du député Mariko adressées au ministre de la sécurité.
Malheureusement, le débat a pris une autre dimension entre le ministre Samaké et le député Oumar Mariko. L’intensité du débat et les échanges assez virils entre les deux parties étaient hors de portée du président Saint- Isaac. Montrant du coup l’incapacité de ce dernier à maîtriser la police des débats parlementaires, doublée de sa partialité sans commune mesure.
Les questions du désormais mal-aimé de la majorité parlementaire, Oumar Mariko portaient sur l’affaire des élèves commissaires de police, le syndicat de la police, l’insécurité et la spéculation sur les passeports et cartes d’identité.
« Quelles dispositions pratiques avez-vous prises pour régulariser cette situation des élèves commissaires, des diplômés de la police, des syndicalistes et des policiers radiés après l’arrêt de la Cour suprême ? Face à l’insécurité grandissante, quelles sont les mesures concrètes prises en termes d’équipement, de dotation en carburant ? Quelle est l’origine de la pénurie de passeport et de cartes d’identité ? » Voilà, entre autres, les questions auxquelles le ministre général Sada Samaké devrait répondre.
Contre toute attente, le ministre Sada Samaké a catégoriquement refusé de répondre aux questions du député Mariko au motif que ces questions ont déjà fait l’objet de débat à l’Assemblée nationale, et certaines relèvent du secret de défense.
Le ministre Sada Samaké, au lieu de répondre aux questions, a indiqué que le député Oumar Mariko n’est plus dans son rôle politique mais plutôt dans un acharnement contre sa personne, avec cette série d’interpellation sur les mêmes sujets. «Il faut éviter cette campagne de dénigrement à laquelle certains organes de presse ont été mis à contribution…Votre problème réel, c’est que je sois membre du gouvernement. Le député Mariko a manipulé les policiers syndicalistes à faire preuve d’indiscipline. C’est Mariko qui pousse certains éléments à être dans des schémas de déstabilisation du pays. C’est fini, tout ça ! Il n’y aura plus de coup d’Etat au Mali. Aujourd’hui, ils sont en prison. Vous, vous êtes ici. Je vous connais… Moi, on connaît mon parcours. Il est édifiant. Je n’ai plus rien à prouver dans ce pays. Je vous invite à éviter de vous inscrire dans des agitations puériles et stériles», voilà les délations de notre cher général ministre de la sécurité à l’encontre du député Mariko. Avant d’enfoncer le clou: «on connaît le rôle que le député a joué dans les troubles provoqués par des forces de sécurité». Après cette offensive verbale, le ministre a tenté de répondre plus ou moins à certaines préoccupations. Selon lui, l’affaire des élèves commissaires de police avait été tranchée par un arrêt de la Cour suprême. Mais que c’est le pouvoir exécutif qui doit apprécier de l’opportunité de la mise en œuvre de cette décision de justice ou des textes administratifs l’appliquant.
La réplique du député Oumar Mariko ne s’est pas fait attendre. Je ne m’abrite que derrière mon peuple et Dieu. «Les propos du ministre ressemblent plus à un meeting politique qu’a des réponses claires à l’intention du peuple, et cela ne m’intéresse guère. Je veux tout simplement des réponses concrètes. Vous avez une manière sélective d’appliquer la loi, et, concernant l’affaire des commissaires, j’ai ici l’arrêté qui fait de l’inspecteur Kadiatou Traoré, matricule 0760 nommée élève commissaire de police. Cet arrêté vient après ceux qui ont gagné le procès à la Cour suprême, alors il faut les intégrer avant cette dernière et c’est ce que dit la loi». Sur le phénomène de l’insécurité, le député Mariko a indiqué que les assurances du ministre ne sont que des illusions. «Votre incapacité de répondre à mes questions ne m’étonne pas, nous constatons que vous avez montré vos limite à assurer la protection du peuple malien».
Le député Mariko enfonce le clou en mettant le ministre dans ses petits souliers: «Je vous connais très bien, monsieur le ministre. Vous n’avez jamais été un officier de terrain. Vous êtes sorti lieutenant plein de l’école militaire inter-arme, contrairement à tes camarades de promotion qui sont sortis comme sous-lieutenants, à cause de vos agitations, et aujourd’hui pourquoi vous ne vous agitez plus ? Vous avez testé les grenades de l’armée en 1991, lors des manifestations contre la dictature pour voir si elles sont létales, et du jour au lendemain vous vous retrouvez dans le camp des putschistes. Voila un agitateur.»
Surpris par la réaction de Mariko, le président de l’Assemblée nationale est intervenu pour demander au député de retirer le mot agitateur qu’il considère comme un écart de langage à l’endroit du ministre. C’était sans compter sur la détermination de Mariko. Sans détour, le député refuse catégoriquement de satisfaire la demande de son président, car le ministre Samaké a été le premier à prononcer le mot «agitateur» que son président lui demande de retirer.
Nouhoum DiCKO