Les funérailles de la grande cantatrice Bako Dagnon, décédée mardi à l’hôpital du Point G, ont eu lieu hier à son domicile à Hamdallaye ACI 2000. La cérémonie funéraire a réuni des membres du gouvernement, des présidents des institutions de la République et de nombreuses personnalités politiques et de la société civile. Le monde des artistes était massivement mobilisé. Le chef de l’Etat, en voyage, a été représenté par son épouse, Mme Keita Aminata Maïga. Une foule d’anonymes a aussi tenu à rendre un dernier hommage à la grande artiste et à l’accompagner à sa dernière demeure.
La cérémonie était dirigée par le Grand chancelier des Ordres nationaux, le colonel Djingarey Touré, car l’illustre défunte était Chevalier de l’Ordre national du Mali depuis janvier 2009.
Ce sont d’abord les artistes qui ont rendu vibrant hommage à Bako Dagnon par la voix de Mbaye Boubacar Diarra, le secrétaire général de l’Union des associations d’artistes et de producteurs du Mali (UAAPREM). S’exprimant aussi au nom de la Fédération nationale des artistes du Mali (FEDAMA), l’ex-réalisateur de l’émission musicale culte de l’ORTM, Top Etoiles, a tenu à rappeler que c’est Bako Dagnon qui fut à l’origine du Téléthon organisé par l’UAAPREM pour apporter une aide aux populations sous occupation au Nord de notre pays. « La quête a rapporté 24 millions de Fcfa, plus des pagnes de Batexi. Le tout a été envoyé au Nord grâce à la collaboration de la Croix rouge malienne », a précisé Mbaye Boubacar Diarra en notant aussi que Bako Dagnon était l’initiatrice de compositions de l’Ensemble instrumental, en collaboration avec de nombreux artistes, consacrées à la réconciliation. Cette contribution des artistes à la paix a été organisée sous l’égide du RECOTRADE.
Mbaye Boubacar Diarra a également retenu parmi les grands combats de Bako Dagnon, la signature du décret sur les droits d’auteur et les droits voisins des droits d’auteur. De nombreux artistes démunis fondaient beaucoup d’espoir sur ce nouveau texte pour goûter à l’usufruit de leurs œuvres. Mais le décret a été annulé par la Cour suprême. Le secrétaire général de l’UAAPREM a saisi l’occasion pour inviter les autorités à aider les artistes à vivre de leur travail.
A la suite de Mbaye Boubacar Diarra, le ministre de la Culture et de l’Artisanat, Mme N’Diaye Ramatoulaye Diallo, a estimé qu’au « lieu de pleurer l’ancienne pensionnaire de l’Ensemble instrumental ou le monument de la musique et de la culture qu’était Bako, toutes les raisons nous encouragent aussi à nous réjouir ce jour». Car l’illustre défunte « a été notre bibliothèque vivante, une bibliothèque qui s’est évertuée à connaître les secrets de l’histoire du Mali et du Manding ».
En saluant la mémoire de l’artiste, le ministre « a aussi salué la grande disponibilité de la citoyenne ». Engagée pour son pays, Bako ne s’est jamais « encombrée de prétexte pour être à l’écart des questions brûlantes du Mali ».
Dans l’oraison funèbre, le colonel Djingarey Touré a, au nom du président de la République, grand maître des Ordres nationaux, rendu hommage à Bako Dagnon. Rappelant le parcours de cette militante de la culture malienne, le Grand chancelier des Ordres nationaux a rappelé Bako Dagnon naquit vers 1953 à Golobladji dans le cercle de Kita. Fille d’une griote, animatrice des cérémonies sociales, elle a grandi dans une famille de griots et depuis son jeune âge, elle accompagnait sa mère dans des cérémonies de mariage ou de baptême. « Des expériences qu’elle mettra à profit pour emmagasiner une connaissance incontestable de la culture mandingue », a souligné Djingarey Touré. Après son passage dans des orchestres privés et à l’Ensemble instrumental, elle s’est lancée dans une carrière solo. Elle a collaboré à deux albums : Electro Bamako de Marc Mineli et Mamani Kéïta en 2001, et la deuxième version de Mandekalu en 2004. Elle est auteur de cinq albums dont « Tiga Moyonko » en 1996, « Titati » en 2007 et « Siriba » en 2009.
C’est sous une pluie battante que Bako Dagnon a été conduite à sa dernière demeure au cimetière de Lafiabougou.
Dors en paix l’artiste !
Y. DOUMBIA