Ces mesures ont été annoncées par le ministre de l’économie numérique, de la communication et de l’information porte parole du Gouvernement. Il était l’invité du journal TV de l’ORTM le mardi 21 juillet 2015. Nous vous proposons l’intégralité de son intervention.
Monsieur le ministre aujourd’hui, ce n’est pas facile d’avoir un passeport malien, doit-on parler de pénurie ou de spéculation ?
Dr Choguel Kokalla Maïga : La question relative à l’obtention du passeport malien a fait beaucoup de débats dans l’opinion, et même à l’Assemblée Nationale. Le Gouvernement a été interpellé plusieurs fois sur la question. Le caractère récurent des débats, j’allais dire des polémiques autour de cette question de passeports a conduit le Chef du Gouvernement, à l’issue d’une réunion, tenue le 16 juillet dernier, à instruire à un comité interministériel, mis en place à cet effet, de trouver définitivement une réponse à cette question lancinante de passeports. Et cela, sur des orientations très fermes du Président de la République, SEM Ibrahim Boubacar Kéita. C’est donc ce comité interministériel qui a rendu compte au Premier ministre, lors d’un conseil de cabinet, tenu le mardi 21 juillet 2015. Le Premier ministre a pris une série de décisions que je suis chargé d’annoncer solennellement à l’opinion publique.
Je dois dire d’abord, qu’il faut faire un certain nombre de constats. Le premier, c’est que cette année, nous avons enregistré une insuffisance importante dans la délivrance des passeports. Alors qu’en 2014 à la même période nous avions enregistré 80.000 arrivées de passeports, cette année la quantité de passeports livrée à l’Administration oscille pratiquement entre 40 000 à 50 000.
Le second constat, c’est qu’il y a une très forte demande constatée sur l’ensemble du territoire national, de Kayes à Kidal. Un phénomène nouveau qui mérite d’être étudié. Pourquoi cette forte demande, et surtout de la part de la jeunesse?
Le troisième constat fait ressortir que dans notre pays, nous avons à date, c’est-à-dire aujourd’hui près de 9 300 demandes non satisfaites. Mais ce n’est pas ça qui intéresse l’opinion. Ce qui intéresse les citoyens, c’est qu’ils aient leurs passeports. Et dans cette problématique, vous avez trois acteurs. Le premier, c’est l’Etat, qui a l’obligation de donner le passeport aux citoyens. Le deuxième acteur, c’est l’administration (les agents de l’Etat) et enfin le troisième acteur ce sont les citoyens.
Ainsi, chacun des acteurs doit prendre ses responsabilités. Et l’Etat a pris les siennes à partir d’aujourd’hui à travers les conclusions que le Chef du Gouvernement a tirées, et qui doivent s’appliquer impérativement à partir de ce jeudi.
Ces mesures sont les suivantes, et je vais vous les annoncer de façon très précise.
D’abord le ministre de la Sécurité et de la Protection Civile a mis en place depuis hier mercredi, plusieurs brigades, autrement-dit plusieurs équipes qui vont se relayer nuit et jour pour liquider en 10 jours, au plus tard, toutes les demandes en attente, en raison de 700 à 1000 passeports délivrés par jour.
Deuxièmement, il sera désormais exigé la présence physique des demandeurs de passeports. Pour ce faire, les rendez-vous seront désormais fixés entre 06h30 à 8h00. A partir de 8H00, il n’y aura plus de queues devant les services de la police. Et cela, durant tous les jours ouvrables.
Le Chef du Gouvernement a aussi décidé que désormais, la période qui s’écoule entre le dépôt et le retrait du passeport sera de 2 semaines, contre 1 à 3 mois dans certains pays. Tout cela pour qu’il n’y ait plus d’attroupements au niveau des services de l’immigration.
Il sera mis en place un guichet spécial pour les cas d’urgence, (malades, étudiants boursiers, agents de l’Etat en mission, sportifs). Ceux qui sont concernés par cela, doivent prouver leur statut ou état avec leur papier. L’accès des environs des services de l’immigration sera désormais interdit catégoriquement à toute personne qui n’est pas demandeur de passeport. Autrement dit, les différents intermédiaires qui évoluent dans ce milieu doivent être mis en garde. Il a été décidé aussi d’ouvrir plusieurs endroits de dépôts, il y a aura plusieurs guichets, afin que là où l’on dépose et là où l’on retire soient différents. Également, les fiches à remplir pour obtenir le passeport seront disponibles à 100% pour les citoyens.
Nous avons aussi décidé au niveau du Gouvernement, qu’une fois les demandes enregistrées, un communiqué sera fait avec l’affichage des listes comportant les noms de ceux dont les demandes ont été satisfaites.
Il ne sera plus autorisé au même citoyen d’avoir deux passeports en moins de cinq (5) ans. Car, il y a des gens qui détiennent, ou retirent plusieurs passeports. Tout cela est terminé, conformément à la décision qui a été prise.
Vous savez que pour avoir le passeport, il y a des documents de base qu’il faut fournir. Donc, il y aura désormais un système de vérification. Et lorsque les documents de demande de passeports s’avéreront faux, les agents de l’Etat responsables de cette situation, les maires, les commissaires, les chefs de brigade de la gendarmerie et autres… La décision a été prise de les sanctionner sévèrement, pour que l’exemple soit donné.
Nous avons aussi pris la décision au niveau du comité interministériel, qu’au ministère de la Sécurité et de la Protection Civile, soit mis en place un contrôle interne qui permettra de déceler tous les cas de fraudes. A cet effet, tout agent pris dans cette situation sera purement et simplement licencié. Et concernant les personnes qui tentent de jouer aux intermédiaires, dans le temps on annulait leurs demandes, mais à partir de maintenant, ils seront mis à la disposition de la police judiciaire et des poursuites seront engagées contre eux. Voilà une série de mesures qui ont été prises par le chef du Gouvernement. Elles sont immédiatement en vigueur, à partir d’hier mercredi, et ce jeudi les citoyens doivent constater leurs effets.
On ne pouvait plus continuer sur ce problème de passeport. Il devenait tellement récurent, qu’au lieu de s’occuper des problèmes de développement du pays, la question préoccupait tous les membres du Gouvernement, c’est pourquoi le Président de la République a donné des instructions afin qu’il soit résolu définitivement. Voilà ce que je suis venu vous dire. Mais aussi demander aux citoyens que lorsqu’ils constatent des anomalies de les signaler à qui de droit. Afin que des mesures correctives puissent être apportées au fur et à mesure. Par ce que chaque fois que des mesures sont prises, il me semble qu’il y a des malins qui cherchent à les contourner.
Je dois terminer par dire que dans le processus d’enregistrement, la priorité est donnée aux vieilles personnes, aux femmes enceintes, aux femmes, aux enfants et après aux hommes.
Vous avez évoqué deux (2) heures comme temps indiqué pour les dépôts, est ce que cela n’est pas courte au regard de la forte demande ?
Vous savez lorsque les rangs deviennent plus longs cela ne règle pas le problème, car c’est cela qui fait qu’on voit les citoyens dans la rue toute la journée en rangs. C’est ce qu’on ne veut plus. Maintenant si les services d’immigration estiment qu’ils peuvent aller au-delà des heures dans le processus d’enregistrement, ils peuvent faire plus en termes de temps. Notre préoccupation est qu’il n’y ait plus de pénurie de passeports, et des dispositions sont prises pour qu’il y ait plus de 150 000 passeports disponibles d’ici la fin de l’année. A titre d’information, alors qu’il y a quelques jours, on avait que 800 passeports disponibles, aujourd’hui il y a plus de 30 000 passeports disponibles. Et ce nombre ne diminuera plus, afin qu’on ne parle plus de cette question. Maintenant pour ceux qui s’organisent pour créer la pénurie, il appartient aux services compétents de l’Etat de faire leur travail à leur encontre. Car, tant qu’on n’aura pas sanctionné ceux qui seraient responsables de la pénurie, le phénomène ne sera pas endigué.
On parle également de la réattribution du marché de la confection des passeports à une nouvelle société, que pouvez-vous dire à ce sujet Monsieur le ministre?
Ce sont des questions que certains ont voulu mettr23e en avant pour justifier, ou expliquer la crise. En fait, il appartient à l’Etat de s’organiser et de décider souverainement. Ce qui est important pour les citoyens est qu’il n’y ait pas de pénurie. Pour le reste, les questions de procédure, je crois qu’il y a un appel d’offres international qui a été lancé dans les règles de l’art.
Est-ce que le Gouvernement a pris des mesures contre la spéculation des passeports ?
Evidemment, la spéculation, il y a deux types de personnes qui l’organisent. Il y a ceux qui font l’intermédiaire, qui, certainement, ont des relais dans l’administration, et les agents de l’Etat qui fabriquent des faux papiers.
A cet effet, comme j’ai eu à le dire, les instructions du Premier ministre ont été données pour qu’il y ait un contrôle interne au sein du service de l’immigration. Les cas de fraude qui seront détectés sur la base des faux documents, il faudra remonter la chaine pour déterminer les auteurs. Lorsque c’est des agents des services de l’immigration, ils seront purement et simplement radiés de l’effectif du personnel de l’Etat. C’est la décision qui a été prise. Je pense qu’il faut que ces mesures s’appliquent et dans toute leur rigueur. Car, tout produit qui est rare pousse à la spéculation. C’est ainsi que la première décision que le Gouvernement a prise est de rendre disponibles les passeports. Et le reste des mesures d’accompagnement suivra.
Source MENCI-PG