De mémoire de Malien, ou d’observateur de la vie politique malienne, jamais un discours du Président de la République le jour de la fête de l’Aïd, devant le corps diplomatique, les chefs des institutions de la République, les leaders de la communauté musulmane, les représentants de la société civile, etc ….. jamais un discours n’a été aussi creux, aussi vide, aussi à côté de la plaque !
A cette phase cruciale, la vie de notre nation est marquée notamment par l’insécurité récurrente et généralisée du Nord au Sud , la mal gouvernance, les crimes économiques à répétition, les incertitudes et l’impréparation de l’application de l’accord de paix qui ouvre la voie à une 4ème République, l’ activation accélérée des mouvements djihadistes dans le pays, le chômage endémique des jeunes, la pauvreté généralisée des hommes et des projets, bref un vrai chemin de croix pour cette nation meurtrie depuis 2012.
Ce catalogue peu réjouissant doit donner à tout responsable politique à fortiori le premier d’entre eux à l’occasion de cette grande fête musulmane de communion et de pardon, de livrer à ses hôtes du jour et à travers eux à tous nos concitoyens un message d’espoir, de fermeté, de justice et de responsabilité à la hauteur des enjeux. Un discours mobilisateur et concret, fondateur d’une nouvelle gouvernance tant attendue par tous les Maliens et réclamé à leur nom justement par le Président du Haut Conseil Islamique ce jour là en ces lieux.
Malheureusement, pour le Président, il n’y a aucun péril en la demeure, tout va bien dans le meilleur des mondes après la signature de l’accord de paix, tout sauf l’hygiène de nos mosquées, de nos marchés, l’odeur de nos corps et de nos bouches, bref tout ce qui peut titiller le délicat odorat présidentiel !
Les diplomates étrangers présents à cette leçon d’hygiène ont dû se poser bien de questions, car ils attendaient sûrement autre chose comme tous les autres convives d’ ailleurs qui ont eu à subir le même supplice ! Même si d’entrée de jeu ces mêmes diplomates ont été remerciés pour l’accord ou plutôt les accords de paix aux forceps qu’ils ont imposés en mai et juin 2015 à notre gouvernement qui a dû abandonner une dizaine de pages d’amendements au profit des exigences des rebelles et dont l’application s’annonce comme un véritable chemin de Sisyphe.
Pour un Président responsable et qui se dit attaché viscéralement à son pays, l’ennemi à combattre, la proie doit être l’insécurité, la corruption, l’injustice, la mal gouvernance, les incertitudes de lendemains d’accords de paix chaotiques, le népotisme, l’impunité. Nous aurions aimé entendre à défaut d’un aveu sans complaisance des dérives, au moins un engagement ferme, vigoureux avec effet immédiat par des mesures concrètes de redresser la situation, les Maliens attendaient un sursaut présidentiel.
Au lieu de cela, il leur a été servi l’ombre des odeurs et des puanteurs de la cité et de ses habitants, l’ombre d’une gloriole pitoyable à propos des accords de paix qui ont bien malmené la souveraineté nationale, l’ombre d’une autosatisfaction ubuesque jamais égalée et hors du temps qui n’est pas ressentie par le peuple malien en ces moments difficiles, ce peuple qui n’a pas besoin de Césars, de généraux hissés sur des chars ou de héros grecs ou romains mais d’hommes intègres, simples, consciencieux, travailleurs, soucieux du bien commun et de l’avenir de ce vieux pays ! Ces hommes là Monsieur le Président ne se croiront jamais eux l’égal de Dieu !
Que Dieu sauve le Mali !
Dougoufana