Bamako - En l'absence de revendication de la prise d'otages de Sévaré (centre du Mali), qui a fait treize morts dont cinq contractuels de l'ONU, les soupçons des enquêteurs maliens se portaient lundi
vers un groupe récent allié aux jihadistes d'Ansar Dine.
Par ailleurs, trois militaires maliens ont été tués et quatre blessés lundi "vers 12H30" (locales et GMT) dans la zone de Ténenkou, située, comme Sévaré, dans la région de Mopti, a annoncé le gouvernement malien dans un communiqué diffusé lundi soir.
Leur véhicule "a sauté sur un engin explosif improvisé près de la localité de Diabozo, cercle (département) de Ténenkou", a-t-il dit.
A Sévaré, ville à environ 12 km de Mopti, les enquêteurs maliens ont retrouvé "des numéros de téléphone et des adresses" sur les corps de "terroristes" tués lors de l'assaut des forces maliennes le 7 août à l'hôtel Byblos, a affirmé à l'AFP une source proche de l'enquête.
"Ces données vont aider les enquêteurs à avancer plus vite", a assuré cette source jointe depuis Bamako, la capitale (620 km de Sévaré).
Selon elle, "la thèse" du Front de libération du Macina (FLM) "se précise.
Une carte d'identité trouvée sur un d'entre eux mentionne (le nom de) Tamboura qui serait né à Ténenkou (...), dans la zone du Macina", nom donné par certains à une partie du centre du Mali.
"De forts soupçons pèsent" sur le FLM, "un groupe terroriste qui tient à faire parler de lui par tous les moyens", avait déclaré dimanche à l'AFP une source militaire malienne.
Apparu début 2015, le FLM, qui recrute essentiellement dans la communauté peule, est un mouvement allié à Ansar Dine, un des groupes jihadistes liés à Al-Qaïda ayant contrôlé le nord du pays pendant près de dix mois entre 2012 et janvier 2013
Sévaré se situe à la lisière de ces régions du Nord d'où les jihadistes ont été en grande partie chassés par une intervention militaire internationale déclenchée en janvier 2013 à l'initiative de la France.
- 24 heures de siège -
Quatre jours après l'attaque de l'hôtel à Sévaré, le voile commence à se lever sur le mode d'action des assaillants - dont le nombre total demeurait inconnu, et dont quatre ont été tués - ainsi que sur l'intervention des forces maliennes.
Selon un militaire basé dans la ville, "des traces" des assaillants ont été découvertes dans un bâtiment près du Byblos, "on croit qu'ils ont dormi là-bas et qu'après, ils ont attaqué l'hôtel", a-t-il indiqué.
L'attaque a commencé le 7 août "vers 05H00" (GMT et locales), selon le gouvernement, avec "l'irruption des terroristes" dans l'hôtel où se trouvaient des employés de compagnies sous-traitantes de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma), qu'ils ont retenus.
"Les militaires sont venus rapidement encercler le bâtiment (...). Dans l'après-midi, ils ont lancé une première tentative de libération des otages", d'après la source proche de l'enquête.
"Les assaillants ont vigoureusement riposté, tuant deux soldats et en blessant deux autres. Entre-temps, un terroriste a tenté d'actionner sa charge d'explosif mais il a été abattu par des militaires", a-t-elle dit.
Dans la nuit du 7 au 8 août, "l'unité d'élite transportée par la Minusma est arrivée de Bamako" et le 8 août "vers 04H00, l'assaut final est donné pour libérer le reste des otages", a-t-elle ajouté.
A l'issue de près de 24 heures de siège, cinq contractuels de la Minusma, quatre militaires maliens et quatre assaillants ont été tués, selon un bilan définitif du gouvernement malien, qui a précisé que la force française au Sahel Barkhane et la Minusma avaient contribué au transport des soldats à Sévaré.
- 'La grande peur est passée' -
Parmi les cinq contractuels de l'ONU tués, figure un Sud-Africain, Roelof "Jaco" Janse van Rensburg, 39 ans, sapeur-pompier. Selon son beau-frère Cobus Smal, "Jaco" a prévenu sa famille de l'attaque par SMS, réfugié dans sa salle de bains, évoquant "une zone de guerre à l'extérieur" du bâtiment.
Lundi, l'hôtel Byblos ressemblait à un champ de ruines : murs criblés de balles et percés de trous d'obus, un véhicule calciné à la porte. Dans certaines chambres aux portes arrachées, le sol était jonché de débris ou d'habits, draps et oreillers maculés de sang, selon les premières images obtenues par l'AFP.
"Aujourd'hui, la grande peur est passée", a assuré un habitant de Mopti, un opérateur économique qui se rend quotidiennement à Sévaré.
"Tout va bien maintenant, les commerces et services sont ouverts. Dimanche, beaucoup de mariages ont été célébrés dans la ville, avec des cortèges de voitures et de klaxons comme d'habitude", a assuré un résident de Sévaré.
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