Ma conviction est que le politique doit prendre naturellement le leadership pour donner un sens à la transition malienne qui est en train de devenir pire que le mal qu’elle était censée soigner.
Cheick Modibo Diarra, le Premier ministre de « pleins pouvoirs« , vient d’être démis par la junte du 21 mars 2012 et mis en résidence surveillée. Ce n’est pas une surprise, car depuis plusieurs semaines tous les observateurs avisés de la scène politique savaient que sa tête était mise à prix par ceux-là mêmes qui ont été ses mentors.
C’est une virgule que les putschistes viennent de placer dans l’écriture du « roman » de la transition mais pas encore le point final. En démocrate et républicain convaincu, je ne peux que condamner cet acte. Même si je souhaitais ce départ, la forme n’y est pas et c’est important.
Un nouvel épisode de la transition s’est ouvert avec l’arrivée de Diango Cissoko, qui n’est pas un inconnu au Mali, comme nouveau Premier ministre. Avant de connaître la suite, cette nomination nous sort fort heureusement d’un ostracisme étrange à l’égard de tous ceux qui ont été impliqués dans la gestion au haut niveau de l’Etat depuis 20 ans.
Dans les faits, notre pays est piloté aujourd’hui par un politique à la légitimité fragilisée, un grand commis gestionnaire qui a servi l’Etat depuis plus de trente ans, à sa façon, et un militaire putschiste qui se découvre une vocation politique. Ma conviction est que le politique doit prendre naturellement le leadership pour donner un sens à cette transition qui est en train de devenir pire que le mal qu’elle était censée soigner.
Le grand commis doit servir fidèlement la République en veillant au fonctionnement normal de l’administration publique afin de restaurer la souveraineté et la crédibilité d’un Etat qui est aujourd’hui fort mal-en-point point. Le militaire putschiste, lui, doit faire un choix. S’il veut s’engager en politique, il en a le droit, mais à condition de démissionner de l’armée, comme le prescrit notre Constitution. Mais s’il veut continuer à servir la République en soldat, il doit« rentrer dans les rangs » et se soumettre dans les faits à l’autorité du politique. Ce n’est pas pour rien que l’armée s’appelle « la Grande muette ».
J’ai cependant une appréhension que les décisions des jours à venir sur le processus de mise en place et la composition du gouvernement vont confirmer ou infirmer. Le nouveau Premier ministre de la transition a-t-il réellement pour mission la restauration de la souveraineté de l’Etat sur l’ensemble du territoire national et l’organisation d’élections transparentes, justes et acceptées ? Ou sera-t-il un Cheval de Troie pour des politiciens en uniforme qui n’ont pas encore abattu toutes leurs cartes ?