Pour la énième fois depuis qu’elle est présente au Mali dans le cadre de la protection des populations civiles et de la stabilisation du pays, la mission onusienne vient encore de laisser entrevoir son impartialité dans la gestion de la crise du nord. Elle a établi une zone de sécurité autour de la ville de Kidal pour empêcher les combattants de la plateforme d’en finir avec l’irrédentisme des éléments de la CMA qui sont toujours les premiers à attaquer et les premiers à se plaindre parce qu’ils ont où se plaindre.
Comme à l’accoutumé, c’est encore eux qui ont tiré les premiers avant de se retrancher dans leur base dans la capitale de l’Adrar des Ifoghas. Prenant leur défense comme toujours, la MINUSMA trace sur le territoire d’un pays souverain une ligne à ne pas franchir. Dans le communiqué unilatéral qui a annoncé la décision, elle indiqua que tout mouvement à l’intérieur de cette zone de sécurité par des éléments de la Plateforme, ou affiliés à la Plateforme, sera considéré comme un danger imminent pour la sécurité de la population de la ville de Kidal. Et qu’elle n’hésitera pas à agir en conséquence conformément à son mandat.
Que veut finalement cette Minusma ? C’est la question que les Maliens se posent aujourd’hui au regard des nombreuses actions et décisions de cette organisation qui favorisent les rebelles, une minorité au détriment de la grande majorité de la population. La décision unilatérale de traçage d’une zone de sécurité autour de Kidal, sur un périmètre de 20 km renforce le sentiment anti-Minusma à tel point que certains craignent des soulèvements de la population pour demander le départ de l’organisation Onusienne, qui au lieu d’imposer la paix au Mali, s’emploie à diviser notre pays en prenant chaque des décisions qui favorisent les rebelles.
Un comportement qui trahit sa mission au Mali, qui consiste à aider à la stabilisation du pays, à protéger les populations civiles, à la consolidation de la paix dans les principales agglomérations, à contribuer au rétablissement de l’autorité de l’État dans tout le pays. Mais, au lieu de s’atteler à cette mission, elle s’est trouvée une autre préoccupation, au fil des ans, qui la dévie de son mandat.
Les Maliens déçus par la Minusma
L’arrivée des casques bleus onusiens au Mali avaient été applaudie par les populations qui pensaient que leur présence allait faciliter la gestion de la crise du nord. Mais, hélas ! Après deux mandats, les résultats sont nettement en deçà des attentes. Pis, les actions de la Minusma en faveur des rebelles irritent de plus en plus les populations dont certains n’hésitent plus à élever la voix pour demander son départ et laisser les Maliens et leurs soutiens réels régler leur problème. Car, les errements de la
Minusma ne datent pas d’aujourd’hui. Ils remontent à la mise en œuvre de l’accord de Ouagadougou, signé le 18 juin 2013. Alors que les rebelles du MNLA avaient été chassés des trois régions du Mali, la France s’est débrouillée pour leur ouvrir un couloir de passage pour s’établir à Kidal.
Ainsi le MNLA qui n’existait plus que de nom va profiter de cette occasion pour se refaire de la voix dans la capitale de l’Adrar des Ifogas. Le 2 juin 2013, la situation s’aggrave à Kidal, le MNLA commet des atrocités et des pillages contre les populations noires (Songhoi, Bellas, Peuls…). L’on assiste à une véritable épuration ethnique à Kidal, sans que les forces onusiennes ne lèvent le petit doigt pour dénoncer cette violation grave des droits humains.
Le 4 juin, l’armée malienne se met en mouvement et s’empare d’Anefis après un combat contre le MNLA qui a fait plusieurs morts. La France intervient pour stopper la progression de nos hommes sur Kidal en envoyant une centaine d’hommes avec armes et munition prêts au combat. Au cas où l’armée malienne refuserait d’obtempérer. C’est en ce moment que les autorités de la Transition se décident d’ouvrir les négociations à Ouagadougou sous l’égide de l’ancien président du Faso, Blaise Compaoré, le médiateur alors désigné médiateur de la CEDEAO.
Un accord est finalement arraché afin de permettre la tenue de l’élection présidentielle. Une commission mixte est mise en place pour planifier le retour de l’armée et de l’administration à Kidal et d’encadrer le processus sécuritaire. Un cessez-le-feu immédiat est décrété, ainsi qu’un cantonnement des combattants rebelles. Mais, la rébellion n’a respecté aucun des engagements souscrits librement.
Comme prévu dans cet accord d’étape, il était prévu le cantonnement des rebelles. Mais au lieu de cela, c’est l’armée malienne qui sera plutôt cantonnée à Kidal dans un petit périmètre qu’elle est interdite de franchir par la Minusma et la Force Serval. Pendant ce temps, les rebelles se pavanaient dans la ville avec armes et munition, sans que ces forces amies ne lèvent le petit doigt. C’est dans ce contexte que le Premier ministre Moussa Mara s’est rendu à Kidal en Mai 2014, où il a failli y laisser sa peau.
Car la Minusma n’a pas accepté d’assurer sa protection comme il se devait. Sa délégation a essuyé des tirs des rebelles et cela a provoqué des affrontements meurtriers entre FAMas et rebelles toujours sous le regard passif des casques bleus. Ces affrontements vont conduire à la signature de l’accord de cessez-le-feu du 23 mai 2014 sous la houlette du président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz.
Des traitements de faveur pour les rebelles
Malgré cet accord, les rebelles ne vont pas s’arrêter là. Ils se fichent pas mal des accords qu’Ils signent car ils peuvent se le permettre. Après avoir longtemps attaqué les positions de l’armée malienne et fait de nombreuses victimes civiles comme militaires en violation de l’accord de cessez-le-feu signé le 23 mai 2014, les groupes rebelles vont cibler le camp de la Minusma à Kidal. Obligeant la force onusienne à réagir, mais de façon mitigée, puisqu’elle va signer un accord pour l’établissement d’une « zone temporaire de sécurité » avec les groupes armés sans l’implication des autorités maliennes.
Cet accord stipule : « Les parties conscientes des conséquences malheureuses des confrontations armées sur les populations civiles, il est intervenu entre les deux entités, un accord pour l’établissement d’une zone temporaire de sécurité (ZTS). Il s’agit de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation du Mali (Minusma). La mise en place de la zone temporaire de sécurité (ZTS) n’abroge en rien l’accord de cessez-le-feu du 23 mai 2014 et de ses modalités d’application du 14 juin 2014.
Les parties sont d’accord pour établir une zone temporaire de sécurité (ZTS), située sur l’axe Anefis-Almoustarat de 10 kilomètres de chaque coté de l‘axe. Les deux parties conviennent, qu’afin d’éviter tout risque de confrontations, le port d’armes de combat est interdit dans toute la ZTS, ainsi que toutes les opérations militaires et toutes provocations. Les parties sont aussi d’accord que la Zone Temporaire de Sécurité (ZTS) soit placée sous le contrôle exclusif de la Minusma qui en garantit la sécurité et assure la libre circulation des personnes et des biens.».
Malheureusement cette décision qui n’a pas obtenu les faveurs de la population de Gao et des autorités maliennes sera rejetée par la population à travers des marches de protestation. Le rubbicon a été franchi lorsque les soldats de la Minusma ont ouvert le feu sur des manifestants à Gao faisant trois morts. Ensuite viennent les affrontements de Tanbankort et la prise de Ménaka des mains des combattants du MNLA par le GATIA, un mouvement armé ami, qualifié de milice pro gouvernementale par les médias français. Dans chacun de ces événements, les prises de position de la MINUSMA laissent apparaître clairement son impartialité. Elle a exigé le retrait pur et simple du GATIA de ses nouvelles positions arrachées de force. Mieux, elle s’était même permise de donner un ultimatum aux combattants de la plateforme Gatia lors des événements de Ménaka. Alors que sous occupation des rebelles, cette ville a souffert le martyre sans qu’elle ne pipe mot.
Après la signature de l’accord de paix qui était censé mettre fin à cette crise, les rebelles viennent d’ouvrir à nouveau les hostilités en attaquant les positions des combattants de la plateforme.
Après leur avoir infligé une déculottée samedi dernier à Anefis, et pendant que les combattants du Gatia s’apprêtaient à en finir avec eux jusque dans leur dernier retranchement (Kidal), la Minusma s’est empressée de mettre en place une autre zone de sécurité autour de la capitale de l’Adrar des Ifoghas.
Ces nouvelles mesures prévoient : « Une zone de sécurité de 20 km autour de la ville de Kidal à compter du mardi 18 août dernier à 8h00 et le restera jusqu’à nouvel ordre, Tout mouvement à l’intérieur de cette zone de sécurité par des éléments de la Plateforme, ou affiliés à la Plateforme, seront considérés comme constituant un danger imminent pour la sécurité de la population de la ville de Kidal, en cas de violation de cette zone de sécurité par des éléments de la Plateforme, ou affiliés à la Plateforme, la MINUSMA agira en conséquence conformément à son mandat. » Du deux poids deux mesures.
C’est comme cela que la mesure a été froidement accueillie aussi bien par les autorités maliennes que la population dans son ensemble. C’est pourquoi, la réaction du gouvernement ne s’est pas fait attendre. Il a, dans des termes voilés, dénoncé cette décision de l’Organisation onusienne en l’appelant à rester dans son rôle de protection des populations, et de toutes les populations, dans toutes les zones exposées, à l’instar de Kidal, aux mêmes risques d’insécurité. Car en la matière, tout traitement inéquitable produira des effets pervers nuisibles à la recherche de la paix et de la concorde, a indiqué d’un ton certes mesuré, mais ferme le ministre porte-parole du gouvernement, Choguel K. Maïga à la télévision nationale.
D. Diama