Alors qu’on croyait voir le bout du tunnel avec la signature le 20 juin de l’Accord de paix et de réconciliation de Bamako, contre toute attente, les deux groupes rivaux ont repris les hostilités plongeant ainsi un processus de paix déjà fragile dans l’impasse. Le Groupe d’Auto-défense tamasheks Imgads et Alliés (GATIA), Milice pro-gouvernementale et la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) se regardaient en chiens de faïence depuis la reprise par le premier de la ville de Ménaka.
La CMA, qui avait qualifié l’attaque de Ménaka de énième provocation de la milice pro-Bamako en dépit du cessez-le feu, avait promis de laver l’affront, d’où la rupture. Ainsi, le samedi, dimanche et lundi derniers, le GATIA et la CMA se sont affrontés jusqu’aux alentours de Kidal, environ 50 km de la ville. Si le bilan est diversement interprété, toutes nos sources indiquent une lourde perte en vies humaines et en matériel du côté de la CMA. Pour rappel le GATIA, composé essentiellement de tamasheks, arabes, sonrhaïs, peuls et bêlas, a été créé pour non seulement défendre le droit de la majorité des populations du nord, mais aussi et surtout démentir l’allégation, longtemps distillée par les médias occidentaux, selon laquelle « le fantomatique peuple de Azawad voudrait une indépendance ou tout au moins l’autonomie ».
Cette deuxième rupture du cessez-le feu après celle consécutive aux affrontements de Ménaka aboutira forcement à une impasse dans le processus de mise en œuvre de la paix. Chaque partie est ainsi renvoyée à ses responsabilités face à l’histoire. L’Etat malien en premier lieu, la communauté internationale à travers la MINUSMA et les groupes armés. La responsabilité de l’Etat est engagée pour avoir trainé les pieds dans la mise en œuvre de l’accord signé depuis le 20 juin. Aucun signe probant de bonne volonté du gouvernement. Le président aurait dû jouer contre la montre en formant rapidement le nouveau gouvernement post-crise et en intégrant les groupes armés signataires.
Constat alarmant d’une lourdeur certaine, il est toujours à la case départ, tantôt c’est le blocage dans la mise en place du comité de suivi, tantôt c’est la sur- représentativité de certains groupes qui ne semblent avoir aucune légitimité sur le terrain. Toute chose qui a irrité les groupes armés qui attendent tous le dénouement rapide de cette crise. La responsabilité de la MINUSMA est avérée, parce qu’elle ne joue pas son rôle de structure de maintien de la paix. Pire, elle est taxée par la majorité des maliens de complaisance vis-à-vis de la CMA. La structure Onusienne fait l’objet de toutes sortes de critiques. Fait nouveau, c’est la CMA qui s’oppose à la mesure prise par la MINUSMA de créer une zone de sécurité de 50 KM autour de Kidal.
Elle s’insurge contre cette décision et demande à la MINUSMA de lever toute restriction afin qu’elle en découd définitivement avec le GATIA. Les groupes armés ont leur part de responsabilité en tombant dans la provocation. Et cette provocation est l’œuvre de la CMA qui, même après la signature de l’accord de paix, se croit toujours en territoire conquis, alors que le Mali devrait a la suite de la signature des accords recouvrer la totalité de son territoire permettant ainsi au gouvernement, via ses représentants, d’aller et venir librement sur toute l’étendue du territoire national. Vivement la prise de conscience du gouvernement pour la mise en œuvre diligente de l’accord de paix et de réconciliation au grand bonheur du peuple malien. Il devra adopter une véritable politique de communication de crise qui anticipe sur les choses au lieu qu’elle ne s’attache à les gérer. Les travaux de la commission sont à peine connus du grand public.
Youssouf Sissoko