72 heures après l’annonce par la Coordination des mouvements armés (CMA) de la suspension de sa participation au Comité de suivi de l’accord (CSA), aucune réaction officielle de la part de la Minusma, encore moins de la toute puissante Médiation internationale, pour dénoncer ou condamner cette décision aussi grave que l’acte de violation du cessez-le-feu, venant de cet acteur ‘’important’’ du processus de paix.
Au regard de toute son importance dans le processus de paix dans notre pays, le retrait d’une partie du Comité de suivi de l’Accord est pire qu’une violation du cessez-le-feu, prévu et puni par les dispositions de l’accord de paix. En effet, le chapitre 19 de l’accord consacre la création du Comité de suivi de l’accord, dès sa signature. Il est composé comme suit: «le Gouvernement du Mali, les mouvements signataires du présent Accord et la Médiation (Algérie, en tant que Chef de file, Burkina Faso, Mauritanie, Niger, Tchad, CEDEAO, Nations Unies, OCI, UA, UE,).Les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies sont invités à participer aux travaux du Comité. Le CSA peut, en outre, inviter, en tant que de besoins, d’autres acteurs et institutions financières internationales, à participer à ses travaux».
Le CSA a pour mission d’« assurer le suivi, le contrôle, la supervision et la coordination de l’application effective par les Parties de toutes les dispositions de l’Accord, et cela sans préjudice du mandat confié à la MINUSMA par le Conseil de Sécurité ; élaborer un chronogramme détaillé de mise en œuvre des dispositions pertinentes de l’Accord et veiller à son respect ;assurer l’interprétation des dispositions pertinentes de l’Accord en cas de divergences entre les Parties ;concilier, le cas échéant, les points de vue des Parties ; et encourager le Gouvernement à prendre toutes les mesures jugées nécessaires à la mise en œuvre effective des dispositions de l’Accord, y compris :la présence des services publics déconcentrés et décentralisés au Nord ;l’adoption diligente des textes constitutionnels, législatifs et réglementaires pour permettre la mise en œuvre des dispositions de l’Accord» (Article 60).
En annonçant leur suspension de la participation à ce dispositif, lundi dernier, les rebelles de Kidal ont choisi de bloquer délibérément le processus de paix qui entrait dans sa phase cruciale: Cantonnement, intégration et désarmement, démobilisation, et réinsertion (DDR).
« Nous venons de rencontrer la médiation internationale au siège de la mission de l’ONU au Mali. Jusqu’à ce que les groupes de la plateforme (pro-gouvernementaux) quittent la ville d’Anéfis (sous leur contrôle depuis mi-août), nous suspendons notre participation aux travaux du comité de suivi des accords d’Alger », a déclaré, dimanche dernier, Sidi Brahim Ould Sidati, représentant de la coordination des mouvements de l’Azawad (CMA).
Une source sécuritaire au sein de la mission de l’ONU au Mali, qui a assisté à la même réunion, a confirmé à l’AFP cette information du retrait de la CMA au Comité de suivi de l’accord, mais restait toutefois ‘’optimiste pour la suite du processus.
Depuis cette déclaration préoccupante, la MINUSMA ainsi que la Médiation internationale, incontournables dans le processus, ne pipent mot sur cette décision de la CMA. Ce silence de la part d’acteurs garants de la bonne marche du processus de paix dans notre pays, qui ne manquaient d’aucune occasion pour évoquer les moindres ‘’erreurs’’ de la Plateforme ou du gouvernement, est plus que scandaleux.
Ce silence plus qu’assourdissant ne peut être compris que par la complicité et la partialité de la Minusma en faveur de ses protégés de Kidal. Et, le commun des Maliens imagine déjà la sanction qui pouvait attendre la Plateforme et alliés, nommément cités comme les violateurs du cessez-le-feu, partant de l’accord de paix.
Après avoir fait endosser à la Plateforme, la responsabilité de violer le cessez-le-feu, dans les derniers affrontements entre groupes armés à Anefis, avant même les résultats d’une véritable enquête sur le terrain, la Minusma, unilatéralement, sans aucune concertation avec les autres acteurs du processus de paix, instaure une zone de sécurité autour de la ville de Kidal. Un acte qui peut être lourd de conséquences pour cette mission qui a besoin d’une bonne collaboration avec l’ensemble des Maliens pour mener à bien sa mission.
Face aux déviances dramatiques de la mission onusienne à laquelle l’ensemble des forces vives de notre pays est témoins, la Minusma en tant que garante de la mise en œuvre de l’accord, ne cesse de perdre en crédibilité.
Très souvent considérée comme la marionnette d’une certaine communauté internationale dont elle protège jalousement les intérêts au détriment du peuple du Mali et de son unité, la Minusma semble jouer à sa perte dans notre pays où la patience des habitants a une limite.
Ils sont nombreux, les Maliens, à s’interroger de plus en plus sur les vrais motifs de la présence de la Minusma dans notre pays: s’agit-il réellement d’une mission de stabilisation, d’instauration de la paix et de l’intégrité territoriale de notre pays, ou de sa déstabilisation et sa partition au profit des séparatistes de la CMA ?
Les uns et les autres commencent à choisir leur camp. Puisque, depuis 2013 où elle s’est déployée suite à une intervention française, la problématique de l’instauration territoriale du Mali reste entière.
Pire, la Minusma est toujours en première ligne pour secourir dès qu’il s’agit de sauver des séparatistes, sous prétexte de protéger les populations civiles des affres de la violence.
L’instauration d’une zone de sécurité autour de Kidal en est une illustration parfaite. Pourtant, au même moment, et en d’autres endroits du même territoire, des civils sont égorgés, violés, brutalisés… sous les pieds de la même Minusma, très allergique à toute qualification de partialité à son égard.
Que veut-elle alors ? En tout cas, la vive réactivité de sa part à mettre unilatéralement autour de Kidal une zone d’exclusion contre la Plateforme et alliés et le silence scandaleux face au retrait de la CMA au CSA ne peuvent être que le deux poids deux mesures. Aujourd’hui, ses prises de position flagrantes en faveur de ces rebelles non encore repentis laissent de nombreux Maliens perplexes.
Par Sidi Dao