Les derniers événements survenus à Anefis, dans la région de Kidal, ont levé toute équivoque quant au soutien de la France aux touaregs de la Coordination des Mouvements de l’Azawad. Ils ont non seulement permis au citoyen lambda de découvrir que la MINUSMA, ce gros machin des Nations-Unies, n’est en réalité qu’une marionnette à la solde de la France colonialiste et impériale. Mais pour quelle fin la France voudrait-elle couper Kidal du reste du Mali ?
Qu’est-ce que la France peut bien négocier avec la CMA qu’elle ne le peut avec l’Etat souverain du Mali ? Pourquoi la France accepte-t-elle de faire pour les touaregs de la CMA ce qu’elle n’a pas fait pour les corses, les basques et les bretons ? L’ONU est-elle encore universelle ? Comment peut-elle accepter sans coups férir la violation ouverte du droit international au Mali, fondement de la paix mondiale ?
Le plus difficile à consommer par un malien dans cette guerre de positionnement entre les puissances occidentales pour l’exploitation des ressources minières au Mali est qu’elles éclatent à l’année du centenaire de la naissance du président Modibo Keita. On se rappelle que le père de la Nation, président de la Fédération du Mali s’était détourné de la France en se tournant résolument vers le bloc de l’Est dont il avait pressenti la toute-puissance montante de la Chine.
Ce choix politique du père de la Nation malienne pour le marxisme-léninisme de l’Union Soviétique avait été considéré par la France comme un désaveu de taille et un affront qu’il fallait à tout prix laver, un jour ou l’autre. La première réaction ne s’est pas fait attendre. Celui devant lequel De Gaulle reconnaissait qu’il n’avait pas besoin de baisser la tête pour lui parler au sens propre comme au sens figuré dont le panafricanisme tranchait avec les intérêts français sera renversé par le coup d’Etat rétrograde du Comité Militaire de Libération Nationale le 19 Novembre 1968 et dont le colonel Moussa Traoré n’était qu’un pur pion de l’impérialisme français.
Ce coup d’Etat a été commandité, planifié et exécuté par les services secrets de la France-Afrique de Jacques Focard en complicité avec quelques militaires félons de l’époque. Tous les acquis du régime socialiste de Modibo seront ainsi détruits par les nouveaux maîtres du jour et le Mali ramené à sa case de départ. Les sociétés et entreprises d’Etat seront systématiquement pillées. Le franc-malien, symbole de la toute nouvelle souveraineté du Mali qui remplaça par le franc des colonies françaises d’Afrique (CFA) sera à son tour liquidé.
La voie pour l’asservissement moral, intellectuel, politique et économique du Mali sera a ainsi ouverte par la gestion catastrophique et amateuriste du CMLN. La gouvernance dans la médiocrité des militaires continuera ainsi jusqu’en mars 91, date de la chute du régime totalitaire et dictatorial de Moussa Traoré, après les journées sanglantes du jeudi et vendredi noirs.
Là également la France jouera un rôle prépondérant, surtout après le discours de la Baule de François Mitterrand où Moussa Traoré oublia comment il était venu et osa s’opposer à la volonté d’ouverture démocratique voulu par les socialistes français, plus humains et plus proches des idéaux de la France de 1789. De la dictature à la démocratie, le chemin a été long et plein d’embuches.
Les régimes se sont succédé, d’Alpha Oumar Konaré à IBK en passant par ATT. Les évènements de mars 2012 auront finalement confirmé la pensée de De Gaulle qui disait que la France n’a pas d’amis rien que des intérêts à défendre. Et l’intervention Serval nous prouve que la France, qu’elle soit socialiste ou de droite n’a d’amis en Afrique que là où il y a ses intérêts.
Jamais la France n’a eu autant d’influence qu’elle a aujourd’hui au Mali. Et le soutien aux touaregs de la CMA pour le contrôle de Kidal n’a d’autres buts que d’assurer ses arrières dans l’exploitation futures des immenses potentialités énergétiques d’une région aux ressources jusqu’ici insoupçonnées. Tout ce qui nous arrive aujourd’hui semble avoir été planifié depuis les indépendances comme en atteste cette loi encore en vigueur de la République française qui créa l’OCRS.
Partout la stratégie reste la même, créer la chienlit pour ensuite jouer aux sapeurs-pompiers par un retour en « back-door » pour l’exploitation à souhait les ressources économiques du pays. Le projet de déstabilisation du Mali via sa partie septentrionale est un vieux projet de la France, qui n’attendait qu’une opportunité pour faire le larron. En effet, La crise Libyenne en est un élément clef. Tout à commencer après le bombardement par l’OTAN des troupes régaliennes de Mouammar Kadhafi.
ATT, le président malien qui avait pris ses distances en refusant de condamner le Guide de la Révolution, qualifié pour l’occasion par la France et l’Occident de diable qui terrorise son peuple, en aura pour son compte. Pour avoir refusé de condamner Kadhafi il donnera l’occasion idoine au plus négrophobe des présidents français Nicolas Sarkozy de mettre en pratique son plan de reconquête du Mali après que ATT eu refusé de signer l’Accord de rapatriement des maliens en situation irrégulière en France.
Sinon, dites-nous comment de longues colonnes lourdement armées ont pu traverser la Libye, le Niger pour se retrouver au Mali sans en être inquiétées en dépit des immenses moyens sophistiqués de surveillance spatiale dont disposent les forces de l’Otan ?
Connaissant la faible capacité des armées africaines, pourquoi l’OTAN n’a-t-elle pas stoppé ces engins de dernière génération qui ont été extorqués des garnisons de la Libye ?
Les réponses à ces questions nous édifient suffisamment sur le plan machiavélique de la politique de recolonisation programmée de ses anciennes colonies par la France qui en a ainsi décidé d’en découdre avec le régime d’ATT et de mettre en marche son vaste projet d’exploitation des ressources minières énergétiques, militaires et phréatiques du Mali. Le plan de la France a bien marché avec le MNLA, composé d’une infime minorité parmi la minorité des touaregs et arabes du Mali.
La CMA, ce machin qui n’existe que grâce aux médias de propagande occidentaux, a pris en otage tout un peuple vieux de 1000 ans d’histoire, juste pour sauvegarder les intérêts de la France. Sinon comment comprendre qu’après l’acte salvateur de libération du Mali du joug Jihadiste par les forces Serval françaises dont nous saluons toujours le sacrifice, que l’armée malienne ne soit pas autorisée à franchir les portes de la capitale de l’Adrar des Ifoghas ?
Que cache réellement la France ?
Comment comprendre que même, après la reprise par un autre groupe armé composé également de touaregs et arabes des localités de Ménaka et tout récemment d’Anefis, considérées par tous les observateurs avertis de la crise malienne comme le bastion de la drogue, la France continue de passer par la MINUSMA pour créer des zones de sécurité tantôt autour de Ménaka tantôt autour de Kidal en totale exclusion de l’Armée républicaine du Mali.
Quelle aberration ! Tout se passe comme si Kidal était entrain d’échapper au contrôle de l’Etat. Pire la CMA, la nouvelle coalition rebelle demande le retrait sans condition du GATIA des zones occupées.
Et l’information, de sources concordantes, relayée par plusieurs médias nationaux et étrangers fait état de don de la France à la CMA d’armes et de véhicules de combat en vue de pallier à une éventuelle attaque du GATIA ou de l’Armée malienne. Notre source indique également que la France aurait commencé l’exploitation de certaines ressources en complicité avec certains pays voisins qui ont ouvert leur espace aérien à la France. Si ces informations se confirmaient, elles seraient porteuses de graves conséquences pour l’avenir des relations diplomatiques entre la France et le Mali.
Vivement le réveil de la Diplomatie malienne pour non seulement démonter avec pièces et convictions aux Nations-Unies que la supercherie française n’a d’autres fondements que l’exploitation forcée des ressources d’un pays indépendant sous le prétexte fallacieux du soucis de préserver les droits de minorité à vivre dignement. Mais que la France n’oublie pas que dans ce pays, « à chaque fois que tout semblait perdu, un homme s’est levé et a bâti un Empire. Un Soundiata par ici, un Samory, Un Babemba, un El Hadj Oumar, un Firhoun, par là. Il n’est pas possible que cet héritage n’ait pas laissé sur cette terre et dans le sang des Hommes les germes d’un renouveau. »
Youssouf Sissoko