En étant “ivre de bonheur” face à Mahamadou Djery Maïga de la Coordination des mouvements armés de l’Azawad (Cma) le 20 juin 2015 lors la signature de l’accord de paix par cette dernière au Cicb, IBK n’imaginait pas qu’il allait, deux (2) mois plus tard, être confronté à un choix cornélien dans la crise du Nord du Mali.
Les négociations de paix débutées sur les braises des affrontements ‘’Moussa Maranesques’’ de Kidal de mai 2014 à Alger dans le prolongement de l’accord préliminaire du 18 juin 2013 de Ouagadougou, ont abouti non pas à un accord de paix mais à des accords de guerre.
Car si la Plateforme, mouvement pro Mali, qui comme le gouvernement du Mali s’était dite satisfaite par le texte parachevé à Alger en mars 2015 et qui l’a signé dans le sillage du gouvernement du Mali depuis la très médiatisée signature du 15 mai 2015 à Bamako, la Cma s’est faite désirée pendant un bon mois au prétexte qu’elle consulte sa base Kidaloise.
Après avoir été bichonnée, chouchoutée et dorlotée par la médiation internationale à Kidal jusqu’à friser l’énervement, la Cma réussit à faire plier le gouvernement malien sur un accord greffon qu’ils appellent “arrangements sécuritaires” qui n’est signé qu’entre elle et le gouvernement du Mali et qui ignore royalement le très patriotique mouvement de la Plateforme.
Peut-on greffer un arrangement sécuritaire bilatéral sur un accord de paix multilatéral sans en transformer la substance et le réduire en un vulgaire accord de guerre?
C’est le pari d’IBK et de sa flopée de négociateurs immigrés à Alger à la tête desquels se trouvait le ministre Abdoulaye Diop des affaires étrangères. Alors que le volet sécuritaire de l’accord mère du 15 mai 2015 est clair sur le désarmement des groupes armés, leur démobilisation et leur réinsertion dans une optique d’unicité des forces armées du Mali, l’accord d’arrangement sécurité conclue avec la Cma prête à équivoque.
Mais plus de 2 mois après la signature du 20 juin 2015, point n’est vu un quelconque groupe armé désarmé au nord du Mali à fortiori d’être démobilisé et réinséré dans l’armée malienne ou dans une autre structure publique nationale ou régionale.
Mais au vu et au su de tout le monde, on a vu la recrudescence des attaques armées contre les positions de l’armée au nord comme au sud du pays depuis le 20 juin 2015. Puisque ni la médiation internationale, ni la Minusma, ni le gouvernement du Mali, encore moins les groupes armés du Nord ne pipent mot concernant le volet désarmement des groupes armés qui écument le nord du Mali et gesticulent tous comme des automates dans l’embryonnaire “Comité de suivi de l’accord de la paix”, les mêmes causes provoquent toujours les mêmes effets, malheureusement.
De Ménaka à Anefis ni les itinéraires et ni les arsenaux militaires des groupes armés n’ont subis le moindre changement. Alors les lois de la physique n’ont pas tardé à avoir raison des bonnes intentions de paix: “Tout corps plongé dans l’eau, subit une pression qui lui est exercée de bas en haut” disait en substance Archimède il y a plusieurs centaines d’années.
Aujourd’hui au nord du Mali, tout élément de la Cma qui s’aventure dans une zone contrôlée par le Gatia subit une pression d’Anéfis à Kidal proportionnelle au rapport de force du moment. C’est exactement ce qui s’est passé le weekend du 15 août 2015 au Mali.
La médiation internationale qui s’étonne de cette loi de la physique pourtant prouvée depuis l’antiquité grecque, doit savoir que si elle parle d’accord impliquant la Plateforme donc le Gatia, elle doit savoir que l’arrangement sécuritaire entre le gouvernement du Mali et la Cma n’est pas opposable à la plateforme puisqu’elle ne l’a jamais signée.
La Cma en provoquant le Gatia à Anéfis était-elle nantie de l’arrangement sécuritaire mijoté nuitamment à Alger pour elle ou de l’accord mère de paix du 15 mai 2015?
La plateforme sommée de quitter injustement Anefis !
IBK en demandant à la plateforme de déguerpir d’Anéfis le fait-il en qualité de quoi, président de la république du Mali ou chef de la plateforme car à ce que qu’on sache, la plateforme est un mouvement autonome?
Et si le président IBK peut faire une injonction à un groupe armé autonome de quitter une ville acquise au prix de hautes luttes, qu’est-ce qu’il attend donc pour envoyer un “décret de déguerpissement” aux éléments de la Cma à Kidal puisqu’ils la squattent depuis le 21 mai 2015 sans que la Minusma, pourtant nantie d’un doctorat de zone de sécurité, ne daigne piper mot pour qu’ils déguerpissent de cette cité de l’Adrar?
En voulant trop dorloter la Cma, la médiation internationale, la Minusma et le gouvernement du Mali risquent de donner une autre dimension au conflit du Nord du Mali car les groupes armés qui s’affrontent au nord le font d’abord par communautarisme exacerbé et personne n’est plus originaire du nord du Mali que les combattants du Gatia et du Maa loyaliste (bras armés de la Plateforme), donc ils sont chez eux à Anéfis. Les faire partir à coups de grands renforts de menaces machiavéliques ou essayer de les faire partir pour les beaux yeux des occidentaux est une irresponsabilité grave quel que soit le motif.
Ce que la médiation internationale et la Minusma peuvent faire et qui ira dans le sens de la paix tant criée depuis belle lurette, c’est d’imposer le désarmement de tous les groupes armés du Nord du Mali et d’épauler le gouvernement mort-né d’IBK à les démobiliser totalement et les réinsérer convenablement et le plus tôt est le mieux sinon tout le monde regrettera d’avoir tiré le poker perdant au nord du Mali.
Aliou Touré