Quel que soit la distance qui puisse séparer le mensonge et la vérité, cette dernière finira toujours par l’attraper. On a beau ignorer la réalité, on finira toujours par accepter que le gouvernement peine à appliquer un programme politique. L’accord d’Alger signé, les 15 mai et 20 juin dernier, battent déjà de l’aile. Et la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) menace de se retirer du processus si le gouvernement s’entête à organiser des élections au nord. La sécurité au nord et dans le reste du pays, n’est pas garantie. Au plan économique, les indicateurs sont au rouge.
Le panier de la ménagère n’est pas enviable. Ça gronde au niveau du social. Pendant ce temps, c’est le blocage au niveau politique avec un gouvernement qui a du mal à associer les autres acteurs et une opposition qui frise le ridicule en s’éloignant peu à peu des préoccupations du peuple. Bref, la situation est chaotique. Et l’on réalise que les actes posés çà et là sont, de toute évidence, la conséquence d’un pilotage à vue de l’équipe dirigée par Modibo Keïta.
Au plan sécuritaire, les populations du nord sont désorientées et ne savent plus à quel saint se vouer avec la recrudescence de la violence qui est en train de prendre des proportions inquiétantes. Depuis les évènements d’Anefis, les populations de la région de Tombouctou subissent constamment des agressions et des enlèvements de véhicules. On évoque même la présence d’un réseau de braqueurs. Mais la réalité, c’est que ce banditisme est lié aux rebelles de Kidal et aux terroristes d’ançardine, dont des éléments se sont manifestés à Nara (Koulikoro) et à Fakola (Sikasso).
Aussi, l’on constate un arrêt systématique des travaux du comité de suivi de l’accord d’Alger. Ce blocage serait la conséquence non seulement des querelles d’intérêts entre les acteurs, mais également des évènements d’Anefis. Depuis quelques jours, l’on assiste à des déclarations de guerre de la CMA contre le gouvernement. Rien ne semble préoccuper cette organisation que la réalisation de son projet : la partition du Mali. Tous les moyens sont bons pour affaiblir l’Etat et poursuivre la mission confiée à elle par des ennemis du Mali.
Malgré tout, le gouvernement, dirigé par Modibo Keïta, fonce tête baissée et agit comme si le train de la paix est en marche. L’accord de paix d’Alger a été présenté aux Maliens comme étant l’œuvre d’une « diplomatie qui gagne ». Il a fait l’objet d’une propagande à coût de milliards de FCFA avec à la clé un résultat mitigé. Ses défenseurs n’ont pas hésité à le comparer aux précédents accords qui, pour autant, ont su imposer la paix dans notre pays. Mais celui-ci (l’accord des 15 mai et 20 juin), depuis sa signature, n’a apporté que déception et désolation à nos compatriotes. Des braves soldats sont assassinés à longueur de journée. Les populations du nord sont violentées et dépouillées de leurs biens. Pendant ce temps, la CMA se la coule douce dans des hôtels de luxe à Bamako, Paris et Alger.
Inflation et paupérisation généralisée
Au plan économique, les indicateurs sont visiblement au rouge. Tous les secteurs d’activités sont à l’agonie. Banquiers, opérateurs économiques et investisseurs ont du mal à accorder leur violon. Chaque partie aurait renforcé ses garde-fous pour mieux se protéger contre l’autre. Du coup, l’économie nationale est au ralentie. L’inflation grimpe. Et la paupérisation généralisée frappe la population et immobilise les secteurs productifs. Dans un tel contexte, difficile pour les investisseurs de répondre à l’appel du gouvernement. C’est la conséquence du tâtonnement des pouvoirs publics.
S’agissant du social, on ne peut non plus se réjouir, car les organisations syndicales ont multiplié ces temps-ci des mouvements de grève. Pendant que d’autres sont désamorcés à force de menaces « administratives », certains syndicats ont tout de même observés des grèves. Ces syndicats ne sont pas malheureusement les seuls à se plaindre de leur quotidien. Il y a aussi les populations qui ont du mal à joindre les deux bouts avec la cherté de la vie. Tout est cher. Le gouvernement peine à trouver des réponses à l’inflation galopante. Les prix des denrées de première nécessité ne sont pas maitrisés. Et la souffrance des ménages va du mal en pis.
Enfin, au plan politique, c’est la reculade. Le gouvernement, sans un véritable programme de travail, excelle dans le tâtonnement, l’improvisation et le trompe-l’œil dans tous les domaines. Depuis avril 2014, les Maliens se préparent à renouveler le mandat des conseillers communaux. Mais l’Etat n’arrive toujours pas à réunir les conditions minimum d’organisation des élections communales et régionales. Là également, le pilotage à vue a pignon sur rue. Rien ne semble assurer de l’organisation de ces élections dans un délai raisonnable. Tout simplement, parce que le gouvernement ne semble pas décidé à associer à ses décisions l’ensemble des acteurs concernés.
L’organisation des élections communales et régionales, surtout dans le septentrion, requiert des préalables sans lesquels il sera difficile de réaliser une telle entreprise. Il s’agit, entre autres, du respect de l’accord de paix. Qui conditionne le retour des réfugiés à l’organisation des élections au nord.
Que dire du blocage du statut de l’opposition ? Depuis sa nomination comme chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé n’est pas encore parvenu à installer son cabinet. Là aussi, le gouvernement accuse un retard qui ne se justifie pas. Voici comment le Mali est dirigé ( ?) sous IBK… C’est tout simplement du pilotage à vue.
Idrissa Maïga