TRIPOLI - En décidant de fermer les frontières sud de la lIbye, l`Assemblée nationale libyenne a confié à sa jeune armée mal équipée une mission impossible dans un no man`s land désertique où fleurissent les trafics en tous genres.
"Il ne faut pas prendre de décisions dans la précipitation, surtout quand
nous sommes incapables de les mettre en oeuvre", a déploré mardi le Premier
ministre Ali Zeidan, s`exprimant devant les membres du Congrès général
national (CGN), la plus haute autorité politique du pays.
Dimanche, le CGN a ordonné la fermeture des frontières avec l`Algérie, le
Niger, le Soudan et le Tchad, décrétant le sud du pays zone militaire fermée,
en raison de la détérioration de la sécurité dans la région.
Le ministère des Affaires étrangères a affirmé lundi que la décision avait
été prise en concertation avec les pays concernés.
La Libye envisage d`établir un poste frontière avec chacun de ces quatre
voisins, a affirmé à l`AFP le porte-parole de l`armée, Ali al-Cheikhi,
avertissant que "toute personne entrant ou sortant en dehors de ces postes
sera considérée comme un agent infiltré."
Jusque là, il était possible de traverser en n`importe quel point de la
frontière.
Les analystes considèrent cette mesure comme une réponse à la crise au
Mali, mais avertissent qu`il serait très difficile de la mettre en oeuvre,
compte tenu de la nature poreuse du sud libyen.
"Des combattants et beaucoup d`armes sont arrivés au Mali depuis la Libye.
Le conflit malien a forcé tout le monde à se focaliser sur la situation", a
estimé Jon Mark, analyste à Chatham House, basée à Londres.
Le Mali ne partage pas de frontière avec la Libye, mais les combattants et
les armes y arrivent en transitant par les pays frontaliers comme le Niger ou
l`Algérie, en profitant du chaos régnant après le conflit libyen qui a
renversé le régime de Mouammar Kadhafi l`an dernier.
Au moment où une action militaire internationale se prépare contre les
islamistes radicaux qui occupent le Nord du Mali, un déplacement des
populations a été constaté vers le sud libyen, a averti récemment une députée
libyenne, Souad Ganour.
Les pays de la région craignent un repli vers leurs territoires des
combattants islamistes, a noté M. Mark.
La décision de décréter le sud zone militaire reflète aussi les
préoccupations des autorités quant à d`éventuelles tentatives de
déstabilisation du pays qui seraient conduites par d`anciens responsables du
régime kadhafiste, dont plusieurs avaient trouvé refuge en Algérie ou au
Niger, a souligné l`analyste libyen Saleh al-Senoussi.
Néanmoins, Shashank Joshi, analyste à l`institut Royal United Services,
s`est dit "sceptique" quant à la capacité des autorités libyennes à surveiller
les vastes frontières au relief difficile ou à limiter le trafic d`armes ou la
circulation de personnes et de marchandises.
"Nous avons affaire à des forces armées nationales qui sont extrêmement
faibles et ont du mal à s`affirmer dans les zones côtières très peuplées",
a-t-il dit.
Les nouvelles autorités libyennes ont échoué jusqu`ici à mettre en place
une véritable armée et une police nationale à même de rétablir la sécurité
dans le pays.
Elles peinent à surveiller les frontières terrestres (4.000 km) et
maritimes (2.000 km) et demandent l`aide des pays européens pour faire face
notamment à l`afflux de milliers d`immigrants clandestins venus d`Afrique
sub-saharienne et souhaitant rallier l`Europe.
En 2010, le dirigeant déchu Mouammar Kadhafi avait réclamé quelque 5
milliards d`euros par an à l`Union européenne pour stopper l`immigration
clandestine.
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