Après avoir rencontré les organisations de la société civile, dans la mi-journée, le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, Abdoulaye Idrissa Maïga et ses collaborateurs ont échangé, hier, mardi 15 septembre 2015, avec les représentants de la classe politique au sujet du maintien ou du report des élections communales, régionales et du district de Bamako. Lesquelles élections sont prévues pour se tenir le 25 octobre prochain. A l’issue des débats, les tenants du report apparaissent majoritaires, car plus représentatifs du landernau politique national que ceux qui se sont prononcés pour le respect du calendrier fixé. Le ministre a indiqué avoir pris bonne note de toutes les propositions pour les verser dans la communication qu’il doit présenter aujourd’hui en conseil des ministres , qui prendra la décision qui s’impose.
D’entrée de jeu, le ministre Abdoulaye Idrissa Maïga s’est voulu prêt à recevoir toutes les “ propositions concrètes “ détaillées des acteurs politiques concernant la tenue des prochaines élections. Avant de poser une question qui, à l’en croire, s’adresse à tous ” En reportant ces élections quelle sera notre part de responsabilité ? Quel sera le sort d’un report non encadré par loi ?”, a-t-il déclaré en faisant référence à Jean Jaurès, qui prône un respect des engagements politiques.
Sceau de la responsabilité
Et d’ajouter que “ces échanges doivent être placés sous le sceau de la responsabilité face à l’exigence du renouvellement des mandats des conseillers (communaux et régionaux), qui sont en place depuis 7 ans, alors que leur mandat est de 5 ans “.
Après les précisions du Directeur général de l’Administration du territoire, Amadou Billy Soussoko annonçant qu’au total 1954 et 35 listes de candidatures ont été enregistrées respectivement pour les communales et les régionales/district de Bamako, le Délégué général aux élections, le Général Siaka Sangaré et le président de la CENI, Mamadou Diamoutani ont fait le point des préparatifs techniques des élections estimant que tout est fin pour respecter l’échéance.
Dans ses interventions, la classe politique, quoique divisée sur le maintien ou non de la date du scrutin au 25 octobre, a laissé transparaître une majorité en faveur du report.
La Convention des partis politiques de la majorité présidentielle, bien représentée, entre autres, par Pr Mamadou Kassa Traoré du MIRIA, Pr Tiémoko Sangaré de l’ADEMA, Soumeylou Boubèye Maïga de l’ASMA-CFP, Bocar Moussa Diarra de l’UM-RDA, Ahmed Oinargoum Cissé du BARA, a fait état de ses propositions transmises au gouvernement dans un document dont le ministre a reçu copie. Ce document plaide pour le report des élections avec divers arguments dont ceux relatifs à la nécessité stricte de respecter l’Accord du 20 juin, l’amélioration des conditions sécuritaires, le retour des réfugiés.
Mamadou Kassa Traoré n’a pas souhaité faire de commentaires particuliers sur ce document. Idem pour les leaders de l’ASMA, de l’ADEMA-PASJ. Ce dernier a, toutefois, précisé que le gouvernement a la possibilité de nommer des délégations spéciales pour gérer les collectivités en attendant que les conditions soient réunies pour aller aux urnes. ” Nous à l’ADEMA, n’avons pas peur des élections ; au contraire, mais nous craignons pour l’unité de notre pays… “, a ajouté Pr Tiémoko Sangaré.
Le RPM nuancé
Plutôt nuancé, le RPM (parti au pouvoir) par la voix de Kaba Diarra a sorti ses propositions propres (démarche critiquée par les autres partis de la majorité) a demandant que les élections soient dissociées : les communales à tenir à brève échéance, au plus tard le 27 décembre 2015, ” après analyse des conditions de faisabilité “. Quitte à programmer les régionales un peu plus tard, sans oublier «au pire des cas, la mise en place des délégations spéciales pour 18 à 24 mois au plus…»
Plus virile, Alassane Abba de la CODEM a souligné que les élections ne sont pas possibles au jour d’aujourd’hui dans plusieurs cercles, notamment de Tombouctou, Gao et Mopti sans parler de Kidal où l’administration malienne est totalement absente et l’insécurité est à son paroxysme. «Tenir les élections c’est consacrer définitivement la division du pays et des ressortissants du nord pourraient s’en offusquer pour rallier certains groupes (rebelles) “, a-t-il fulminé.
«Quelle urgence pour ces élections?»
Pour sa part, l’opposition s’est signalée à cette réunion par le 1er vice-président des FARE, Souleymane Koné, le leader du PS Yelen Kura, Amadou Koïta, le cadre de l’URD, Beffon Cissé, Fily Sissoko du PSP, qui ont tous demandé quelle était l’urgence qui pousse le gouvernement à vouloir tenir coûte que coûte ces élections sur l’agenda du 25 octobre, sachant que cela compromettrait la mise en œuvre de l’Accord qu’il a lui-même signé et applaudi et dont certaines dispositions seraient violées par des élections dans les conditions actuelles.
La voix du PRVM Faso ko (opposition) s’est montrée discordante en indiquant par son représentant, Amadou Coulibaly, que les conditions sécuritaires ne seront plus jamais ” bonnes “ pour aller aux urnes et qu’il faut donc tenir ces élections le 25 octobre.
Même son de cloche de la part du Centre malien (à l’exception de Seydou Amadou Touré des FAC qui prône le report) avec Hamane Touré, Bamaba Gagny Kiabou de la COREAM et d’autres formations politiques de moindre envergure. Pour eux, c’est au gouvernement, en tant qu’ “autorité souveraine “ d’apprécier et de décider souverainement d’aller aux élections.
Le ministre et ses collaborateurs ont alors estimé avoir pris bonne note de toutes ces positions et seul le Gouvernement pourra trancher dans les prochains jours.
Bruno D SEGBEDJI