Depuis deux ans, le Mali vit au rythme des scandales politiques, économiques et financiers. De la perte de Kidal, avec la visite de Moussa Mara, à la signature de l’accord de paix (contesté), le régime prouve son incapacité à gérer le Mali et à le sortir de la crise. Et jour après jour, notre pays s’enfonce dans une confusion totale.
S’il y a une promesse qui tenait à cœur aux Maliens à la veille de l’élection présidentielle de juillet 2013 jusqu’à l’investiture du président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, le 4 septembre de la même année, c’est sans doute le règlement de la crise sécuritaire dans les régions du nord. IBK en a fait la promesse. Les Maliens y ont cru. Mais, deux ans après, le résultat est là : la grosse déception.
En effet, avant l’arrivée au pouvoir du chef de l’Etat, les autorités de la transition avaient fait bouger les lignes en donnant des signaux d’espoir pour un règlement définitif de la crise du nord. Il y avait vraisemblablement certains acquis dont la présence de l’administration et de l’armée dans toutes les régions du Mali, y compris Kidal. Qui est considéré comme le bastion de la rébellion.
Autre acquis, c’était la signature de l’accord de Ouaga. Qui a permis l’organisation des élections présidentielles et législatives sur l’ensemble du territoire national. Ces élections ont remis notre pays sur la voie de la démocratie, en lui permettant non seulement d’avoir un président démocratiquement élu, mais aussi de retrouver la place qui est la sienne dans le concert des Nations.
La perte de Kidal
Pendant qu’on avançait, lentement et surement, vers le règlement de cette crise sécuritaire, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, décide brusquement de changer de file de la médiation internationale. Il retire celle-ci au Burkina Faso et à son ancien président Blaise Compaoré, pour la remettre à l’Algérie de Bouteflika. Les problèmes du nord viennent de prendre une nouvelle une nouvelle tournure.
C’est dans ce sillage que Moussa Mara, alors premier ministre, choisit de se rendre à Kidal, avec ou sans l’accord des groupes armés qui contrôlent la localité. Malgré les conseils avisés des partenaires français et de la Minusma, l’ancien chef du gouvernement décide quand même d’y aller. Le voyage provoqua une guerre entre les forces armées maliennes et les groupes armés de Kidal. La suite est connue. Une défaite sanglante et une humiliation sans pareille pour notre armée nationale.
Les rebelles qui sortirent victorieux de cette guerre, en profitent pour relever la barre très haut, en revendiquant l’indépendance de l’Azawad. Pis, ils finirent par s’installer définitivement à Kidal. Qui est toujours sous l’administration de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA). C’est dans cette atmosphère qu’un projet d’accord d’Alger a été soumis aux belligérants, le 29 février 2015. Le gouvernement d’IBK, sans avoir consulté la société civile et les partis politiques, sauta sur l’occasion et paraphe le document, le 1er mars 2015.
Les rebelles refusent de le signer, en prétextant qu’ils allaient le soumettre à leur base ( ?). Une façon plus ou moins directe de dire au gouvernement du Mali « que nous avons un peuple que nous respectons ». Il a fallu plus de deux mois de tractations avec de nouvelles promesses pour que les rebelles acceptent de parapher l’accord de paix issu du processus d’Alger, le 14 mai 2015. Au même moment, il y avait un balai diplomatique à Bamako pour accueillir une trentaine de chefs d’Etat (même si ce sont dix seulement qui ont fait le déplacement), censé participer à une cérémonie grandiose de la signature de l’accord de paix, le 15 mai.
Violation de l’accord d’Alger
Au finish, l’accord de paix (contesté à Bamako et à Kidal), fut signé par le gouvernement et les groupes armés pro-gouvernementaux. Là également, la confusion a régné. La signature d’un accord sous-entend la présence des deux parties ou des belligérants. C’est une première qu’on signe un accord de paix pour le Mali sans la présence des principaux protagonistes.
Mais convaincu que les adversaires d’en face ne font pas le poids, les rebelles de Kidal ont non seulement refuser de signer le même jour que le gouvernement, mais aussi ils ont exigé des pourparlers pour prendre en compte leurs principales doléances. La médiation internationale a accédé à leur demande, en leur offrant sur un plateau d’or, l’autonomie de gestion et un territoire. Trois régions semblent dans le viseur notamment Kidal, Ménaka et Taoudéni.
Pour montrer aux Maliens que l’accord d’Alger ne leur a pas été bien expliqué ou pas expliqué du tout, les combattants de la CMA refusent la libre circulation des personnes et des biens dans les territoires qui sont sous leur contrôle. Ni le gouvernement, encore moins la médiation internationale, n’ont osé interpeller la CMA sur cette violation flagrante de l’accord d’Alger, qu’eux-mêmes ont finalement accepté de signer le 20 juin 2015.
Ce sont les combattants de la plateforme (Gatia) qui ont exprimé leur ras-le-bol, en décidant de protester et même de se battre contre la CMA pour que la communauté internationale soit mise au courant du calvaire des populations de cette partie du Mali. Le combat héroïque de la plateforme a permis aussi aux Maliens de comprendre la confusion qui règne au nord sous le regard complice des forces onusiennes et de la France.
La confusion qui règne dans ce pays n’est pas que sécuritaire. Elle est aussi économique, politique et sociale.
Le président de la République avait promis d’éradiquer la corruption dans notre pays. Son slogan : Tolérance zéro. Il avait aussi promis de prendre certaines mesures dont l'adoption des mesures législatives et règlementaires visant à renforcer la culture de la transparence, durcir les sanctions contre les personnes attentant aux intérêts de la Nation et mobiliser les différents segments de la société civile pour contribuer à l'éradication du fléau de la corruption… Bla-Bla-Bla. Rien de tout ça, malgré les scandales du Boeing présidentiel, de l’achat des équipements militaires, et des engrais frelatés. Et le saignement de l’économie nationale continue. Les dossiers de corruption s’accumulent. Et la justice peine à relever le défi car les personnes impliquées auraient des liens avec la famille ou le parti présidentiels.
Des boucs émissaires
Au niveau politique, le ministre de l’administration territoriale et de la Décentralisation, Abdoulaye Idrissa Maïga, est apparemment le seul membre du gouvernement à croire à la possibilité d’organiser les élections communales et régionales, le 25 octobre prochain. En tout cas, cette volonté affichée s’apparente à une farce orchestrée par l’administration pour cacher son incapacité à faire régner l’ordre et la discipline sur le territoire national. Faire retourner les administrateurs à leur poste respectif au nord du pays, semble plus facile qu’organiser des élections dans une période d’insécurité. Le ministre de l’administration aurait mieux fait en prenant une décision qui contraint l’administration a retourné au nord. Au lieu de dire la vérité aux Maliens, le chef du département en charge de l’administration cherche des boucs émissaires pour leur faire porter le chapeau du report des élections.
Ensuite, l’on n’est pas au bout de la confusion qui a pignon sur rue dans ce pays. Le chef de file de l’opposition n’a toujours pas de cabinet. Tout simplement, parce que le gouvernement n’a pas encore signé les documents nécessaires à la formation de ce cabinet. Déficit budgétaire, manipulations politiques, problèmes d’organisation…, seraient, entre autres, les sources de ce blocage.
Enfin, les dépôts des listes électorales pour les communales et régionales, viennent confirmer la crainte de plusieurs de nos compatriotes sur les ambitions démesurées de la famille du Président IBK. Après son fils (député), le beau-père de celui-ci (président de l’Assemblée Nationale), c’est au tour de la femme de Bébé Doc de vouloir devenir MAIRE. Peut-être que sa candidature (aussi), a été suscitée par…les femmes. Pauvre Mali !
Idrissa Maïga