Depuis les événements de Mars 2012 jusqu’à nos jours, l’ex-Président Alpha Oumar Konaré, s’est « recroquevillé » dans un mutisme intégral, laissant perplexes, la quasi-totalité des maliens. Lui qui aurait, en revanche, tant de choses à dire, vu que le régime dont il a été aux commandes durant toute une décennie, a indubitablement contribué à nous ouvrir les portes de « l’enfer », qu’a vécu le pays.
Comment expliquer un silence aussi lourd de la part de celui dont le système de gestion enclencha les premières dynamiques de la dislocation de l’Armée nationale, conduisant, par le même canal, à asseoir les bases du dépérissement de la souveraineté d’Etat ?
Nombreux sont ceux parmi nos concitoyens qui ont désespérément désiré entendre la version d’Alpha Oumar Konaré sur la crise que traverse le Mali. Malgré l’infatigable insistance de certains journalistes à vouloir lui arracher ne serait-ce que quelques mots, l’ex-Président malien est resté systématiquement accroché à son refus incompris de ne répondre à personne.
Ce silence assourdissant ne serait-il pas l’expression d’un quelconque sentiment de culpabilité ? Bon nombre d’indices semblent, quand même, mieux converger vers cette triste hypothèse. Avant tout, il est à noter néanmoins qu’Alpha Oumar Konaré reste celui parmi les dirigeants de notre pays dont les sorties médiatiques étaient suffisamment bien calculées, le plus souvent.
Mais de là à se taire complètement sur les souffrances d’un peuple profondément meurtri et dont les espoirs pour un lendemain meilleur ne font que s’amenuiser, l’on pourrait décidément voir en l’attitude de l’ex-Président malien, un acte de pure sournoiserie qui s’avoisine à la traîtrise. S’obstiner à faire semblant de fermer les yeux, la bouche et les oreilles aux difficultés les plus suicidaires d’une nation qui t’a pourtant tout donné, un peuple qui t’a vaillamment servi de support démocratique, est simplement ingrat.
En effet, l’essentiel de nos malheurs n’est autre que l’œuvre de processus politiques foncièrement irresponsables dont plusieurs furent amorcés sous le régime Alpha Oumar Konaré. Les phénomènes de l’opportunisme politique et la délinquance financière ont véritablement pris forme dès l’avènement du premier Pouvoir constitutionnellement établi, dirigé par ceux qui se présentaient pourtant comme des « démocrates ».
Le régime AOK, a été pratiquement mêlé à toutes les formes de corruptions. L’espoir de ceux qui avaient héroïquement mené la révolution de Mars 1991, s’est plus tard transformé en désenchantement quand ils ont vu émerger, avec arrogance, au sommet de la nouvelle République, une race d’imposteurs n’ayant point cure de leurs légitimes attentes.
Des détournements, à ciel ouvert, de deniers publics, la banalisation du système éducatif national, la privatisation massive de sociétés d’Etat et son corollaire d’aggravation de la pauvreté, le processus de démobilisation de l’Armée malienne et la dépossession de celle-ci de ses plus grandes capacités d’opération, conduisant irréversiblement à sa déconstruction pure et simple, de grandes décisions politiques, préparant le terrain à la déliquescence de l’Etat d’où la lésion programmée de sa souveraineté, ayant bel et bien été adoptées sous Alpha, etc., constituent entre autres, une part énorme de responsabilité du premier régime démocratiquement élu, dans la crise que traverse le Mali.
Si l’Armée est théoriquement reconnue comme instrument de souveraineté, pourquoi avoir donc tenté de la réduire à sa plus simple expression comme si elle ne servirait définitivement plus rien à son peuple ? Pour preuve, l’ex-Président Konaré n’avait-il pas, lui-même, confirmé cette forfaiture grave, en des termes très clairs et sans aucune pudeur, lorsqu’il déclarait : « Une armée forte est une menace pour la démocratie. »
Après cette gestion chaotique d’AOK et son cortège de « profiteurs », le relai fut dorénavant passé à un Général (ATT) qui mettra en place, le régime le plus laxiste, folklorique et ploutocrate qu’ait connu le pays depuis son accession à l’indépendance. Ce relai fut, à n’en point douter, minutieusement planifié par le Président sortant, lui-même, (Konaré) en faveur du Président entrant (ATT) qui sera élu dans des conditions jusque-là douteuses, essentiellement pour mieux couvrir ses arrières et repasser ensuite le Pouvoir à celui qui, à son tour, saura faire pareil en couvrant les « bêtises » qu’il aura, lui aussi, commises durant son règne.
Voila le plan diabolique, le honteux complot, ourdi contre le peuple malien par des soi-disant démocrates et dont le putsch du 22 Mars 2O12 est venu brusquement mettre à nu. Alpha Oumar Konaré sait donc bien pourquoi il ne peut mot dire. Les cadres de l’ADEMA quasiment imposés à ATT, à l’époque, avaient officieusement pour mission d’« appuyer » ce dernier dans la poursuite d’une politique complètement mensongère, continuant ainsi à nous enfoncer la tête dans le sable.
Le coup d’Etat d’AHS, bien qu’illégal, avait nécessairement une part de légitimité. Il aura objectivement eu pour mérite d’avoir œuvré à une certaine reconversion de la conscience populaire malienne car notre démocratie, en vérité, n’était qu’une farce grotesque au service d’une poignée d’« apatrides » sans scrupule ayant pris en otage, les institutions de la République à des fins presque paternalistes. Voilà, en substance, les raisons du silence coupable d’AOK.
Modibo Kane DIALLO