Rien ne semble plus aller pour les habitants de la Cité des 333 Saints, rapportent des sources locales. En plus des braquages, séquestrations, enlèvements de véhicules et assassinats, les populations doivent faire face maintenant à une hausse considérable des prix des produits de première nécessité dans une région où l’on ne connait quasiment plus la couleur du FCFA. C’est la résultante de l’occupation des alentours de la ville de Tombouctou par la Coordination des Mouvements armés de l’Azawad (CMA) au nez et à la barbe de la MINUSMA.
La situation sécuritaire dans la région de Tombouctou demeure inquiétante, singulièrement sur l’axe Goundam-Tombouctou que personne n’ose plus emprunter. De sources locales, la montée du banditisme dans cette zone est sans précédent et a une conséquence directe sur le quotidien des populations qui ont du mal à se faire approvisionner en vivres.
Les dernières opérations criminelles remontent en fin de semaine dernière, précisément le vendredi 11 septembre 2015, dans la localité de Tintelout. Selon nos informations, un camion d’immatriculation mauritanienne transportant une vingtaine de passagers a été la cible de groupes armés. ” Le camion était discrètement suivi jusqu’à un carrefour où il s’est arrêté pour débarquer un passager…C’est à ce moment que les assaillants sont apparus pour dépouiller la vingtaine de passagers ” explique notre source.
Quasiment, au même moment, des matériels offerts par le Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD) destinés à la jeunesse du Cercle de Tombouctou, ont été interceptés et enlevés par des hommes armés sur l’axe Douentza-Tombouctou. ” Il s’agissait de matériels électriques, de machines à coudre et d’autres kits ” précise un habitant de Douentza.
Ces actes de banditisme ne sont que la suite logique d’innombrables autres qui ont vu des passagers dépossédés de leurs biens. Selon une évaluation crédible, entre fin août et début septembre, une vingtaine d’actes du genre ont été perpétrés sur des civils entre Goundam et Tombouctou, à Echelle, Dari, Boya et Bamabara Maoudé. Dans toutes ces attaques, les victimes, souvent ligotées, ont été dépossédées de leurs biens dont les montants atteignent des dizaines de millions de FCFA suivis d’enlèvements de véhicules.
Le kilo de riz à 400 FCFA et le litre d’essence à 1.000 FCFA
Cette insécurité commence à montrer l’une de ses conséquences les plus néfastes à savoir la flambée des prix des denrées de première nécessité. Avec ces attaques répétées autour de la ville de Tombouctou, son accès et son ravitaillement deviennent de plus en plus difficiles. Ainsi, de sources locales, le kilogramme de riz, qui était cédé à 275 FCFA il y a quelques mois, s’est envolé aujourd’hui entre 350 et 400 FCFA. Cette situation intervient au moment où l’aide alimentaire, accordée par le gouvernement à la région, fait l’objet de soupçons de détournement par certains chefs et notabilités.
Approvisionnée en carburants à partir des frontières mauritanienne et algérienne, la ville est quasiment privée de cette énergie. De 600 FCFA, le litre d’essence est passé actuellement à 1.000 FCFA à Tombouctou avec la déliquescence de la situation sécuritaire. Les rares personnes (fraudeurs) qui alimentent la ville fixent les prix selon leur humeur, souligne un journaliste d’une radio locale ajoutant que ” le sac de charbon coûte également plus de 7.000 FCFA “.
Cette situation vient s’ajouter à un coût de transport qui n’est pas toujours à la portée des populations. Avec l’insécurité et l’état de dégradation avancée de la route, plusieurs passagers préfèrent emprunter la voie fluviale où le transport Tombouctou-Mopti coûte 32.000 FCFA avec la Compagnie malienne de Navigation (COMANAV).
Pour les habitants de Goundam, qui doivent se rendre à Tombouctou pour toute opération bancaire, la situation n’est pas des plus aisées. En effet, avec les multiples attaques, personne n’ose plus emprunter l’axe Tombouctou-Goundam avec de l’argent liquide.
La CMA et la MINUSMA assistent au pourrissement de la situation
Alors que tout cela se passe, on a du mal à comprendre l’impossibilité pour la mission de l’ONU au Mali, qui dispose de forces adéquates dans cette localité, de sécuriser au moins les populations de ces attaques et les routes par lesquelles la ville est approvisionnée en divers produits. Il y a certes des patrouilles régulières, mais au vu de la situation sur le terrain, ces patrouilles doivent être plus régulières pour répondre aux attentes des populations.
Quant à la CMA, qui doit aussi participer à la protection des populations après avoir signé l’Accord de paix en attendant son désarmement, ses combattants sont plutôt accusés d’être les auteurs de ces actes. Disposant de bases depuis quelques semaines à Koyegouma, à 18 km de Goundam, Raselma (43 km de Goundam), Farrach dans la commune d’Essakane, Ber Gargando, plusieurs habitants de la région affirment avec fermeté qu’ils sont à la base du chaos qui prévaut dans la région. Ainsi, du bétail volé et des véhicules enlevées ont été vus à plusieurs reprises à Ber.
L’armée, dans une logique défensive, reste sur ses positions car son moindre mouvement peut être considéré par les Nations-Unies comme une violation du cessez-le-feu. Aboubacar Dicko