PARIS - Après les deux raids éclair qui ont fait tomber Tombouctou et Gao, deux villes stratégiques du Nord du Mali abandonnées par les groupes islamistes armés, la suite des opérations dans cette région, comme une éventuelle poussée vers Kidal, reste une grande inconnue, estiment des experts.
Après ces deux opérations, des groupes islamistes armées se sont repliés
vers Kidal, non loin de la frontière algérienne, et troisième grande ville du
nord du Mali et fief des islamistes d'Ansar Dine (Défenseurs de l'islam) à
1.500 km de Bamako.
La suite se présente-t-elle pour autant favorablement?
Certes "il ne semble plus y avoir grand monde en face, mais les forces
françaises et africaines sont confrontées dans le nord du Mali à une
élongation logistique (accroissement des trajets d'approvisionnement, NDLR) et
à des possibilités d'actes terroristes dans les villes libérées", dit à l'AFP
Eric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement
(CF2R).
Pour autant, poursuit ce spécialiste du terrorisme, les "conditions sont
favorables à des négociations avec Ansar Dine, qui vient de se diviser, et
d'autres mouvements Touareg".
Un nouveau groupe, le Mouvement islamique de l'Azawad (MIA), issu d'une
scission d'avec le groupe islamiste armé Ansar Dine s'est créé au Mali et a
annoncé jeudi vouloir "aller vers une solution pacifique".
De leur côté, les rebelles touareg du Mouvement national pour la libération
de l'Azawad (MNLA) ont assuré le 14 janvier être "prêts à aider" l'armée
française à lutter contre les groupes islamistes armés du nord du Mali.
"Il faut savoir jusqu'où l'on peut aller militairement mais s'appuyer sur
certaines tribus touareg peut être une possibilité", confirme Pascal Le
Pautremat, spécialiste de la région. "Mais pour cela, poursuit-il, il faudrait
reconnaître les droits légitimes des Touareg qui veulent une vraie
reconnaissance politique des pays de la région où ils sont implantés".
Opération ou pas sur Kidal ? La réponse se trouve évidemment au Centre de
planification et de conduite des opérations (CPCO) du ministère de la Défense
à Paris, où les officiers des cellules J2 (renseignement), J3 (conduite des
opérations), J4 (matériel et logistique) et J5 (planification des opérations)
travaillent sur l'opération Serval. Mais, fidèle à sa politique de
communication sur les opérations en cours, le ministère de la Défense se
refuse bien évidemment à tout commentaire.
L'état-major des armées analyse en ce moment les derniers renseignements
obtenus après les deux opérations de Gao et de Tombouctou qui ont mobilisé
près de 2.500 soldats français et maliens.
Ces deux opérations, qui bénéficiaient évidemment de la maîtrise du ciel,
ont profité de la désorganisation des forces islamistes matraquées depuis deux
semaines par les frappes aériennes. Elles ont permis de prendre en tenaille en
48 heures, les villes de Tombouctou et de Gao, s'assurant du même coup du
contrôle de la "Boucle du Niger" lors de deux opérations "intégrées",
relève-t-on de source militaire, associant forces spéciales, renseignement
opérationnel (avions Atlantique 2, drones ...), frappes d'avions Rafale ou
Mirage et d'hélicoptères Tigre, parachutages, colonnes de véhicules de l'avant
blindés (VAB) et de chars légers sur roues Sagaie avec leur canon de 90 mm.
Du coup, les groupes islamistes armés, dont le principal atout dans le
désert malien jusqu'au 11 janvier était la rapidité, font face à leur tour à
des forces françaises et maliennes extrêmement mobiles.