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Corridor Bamako-Dakar : Les mauvaise pratiques ont la vie dure
Publié le mardi 14 mars 2017  |  L’Essor
Accident
© aBamako.com par as
Accident d`un gros porteur sur la route de Kati.
14/08/2012. Kati.
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Tout le long du trajet, passagers et transporteurs sont contraints de sortir de petites coupures de billets de banque pour faire lever les barrières des postes de contrôle.

Un soir de février, le bus « Tilemsi » démarre de sa gare de Badialan en direction de Dakar via Kayes. Une cinquantaine de passagers à bord. Certains débarquent en route. Mais la plupart continue jusque dans la capitale sénégalaise. Ce groupe est essentiellement composé de commerçants allant acheter des produits bon marché. Il y a aussi ceux qui partent pour d’autres motifs. C’est notre cas. Notre bus était impeccable et on sentait bien que la compagnie a fait un investissement important dans le secteur du transport-voyageur, contrairement à des vétérans en la matière qui ont du mal à renouveler leur parc. Tilemsi, Sonef, Africa Tour ou encore Africa Star sont des compagnies qui ont aujourd’hui le vent en poupe. Chez ces nouveaux transporteurs, tout est fait pour séduire. En plus de l’air conditionné qui participe du confort et le wifi offrant l’Internet à bord, les horaires sont respectés. Avec ces compagnies, l’heure, c’est vraiment l’heure. A 18 heures précises, le mastodonte se lance majestueusement sur la route. Après, bien sûr, une sommaire vérification des tickets. Dépassant le vieux quartier de Samé situé dans le bas-fond, on arrive au poste de contrôle de Kati où sont stationnés des centaines de gros porteurs. Les poids lourds sont interdits de circulation dans la ville de Bamako avant minuit. Ils attendent donc la tombée de la nuit pour se mettre en mouvement. C’est ce qui crée un embouteillage monstre à la descente de Samé où les accidents ne sont pas rares. Les familles riveraines se trouvent en danger car à chaque basculement d’un camion, il faut craindre le pire.

A Kati, nous avons perdu environ une heure, en arrêt. Le temps pour le convoyeur de remplir les formalités auprès de différents corps (police, gendarmerie, douane). C’est à partir d’ici que le voyage commence. Et les tracasseries aussi. Quand le bus tente de rouler à vive allure, les nombreux nids de poule l’obligent à ralentir. Les postes de péage encaissent de l’argent, mais l’entretien des routes ne suit pas. Plus la nuit avance, plus le chauffeur tente d’accélérer. L’apprenti chauffeur nous fait croire que les 200 chevaux du moteur diesel sont plus performants à la faveur de la douceur nocturne. Les balancements du car, au gré des virages, n’inquiète point les voyageurs déjà tombés, pour la plupart, dans les mains de Morphée. Au réveil, nous apercevons la ville de Kayes. La capitale de la première Région attend un nouveau pont capable de supporter les rythmes des 300 camions qui y passent par jour. Nous venons de parcourir les 600 km qui séparent la capitale malienne de la ville de Kayes. Le cap est donc mis sur la frontière, Diboly. Le contraste est saisissant. Les conditions de travail des agents des douanes sont encore à améliorer. On est enveloppé d’un nuage de poussière avant d’arriver au bureau des Douanes. Pourtant, l’essentiel des marchandises générant les recettes douanières (plus de 500 milliards) sont prises en charge ici.

LA MAIN À LA POCHE. Les formalités du transit d’un pays à l’autre peuvent devenir des épreuves compliquées. Les nombreux textes communautaires de libre circulation des personnes et des biens ne sont pas correctement appliqués sur le terrain. Des pratiques peu orthodoxes se sont érigées en loi. Les passagers étrangers sont systématiquement obligés de payer entre 1000 et 2000 Fcfa à la police. Du coté malien, les Sénégalais sont les clients. Passé la frontière, nos compatriotes, à leur tour, mettent la main à la poche sans se faire prier. A cela, il faut ajouter les billets distribués par le convoyeur aux postes de contrôle. Mais cette pratique ne gêne guère le transporteur. Cette perception, totalement illégale, est prise en compte dans le prix du ticket que paie le voyageur (30.000 Fcfa). C’est le même système, lorsque le prix du litre de carburant augmente légèrement à la pompe, les transporteurs font grimper disproportionnellement le coût des services.

Le territoire sénégalais commence à Kidira. La bourgade en expansion galopante offre beaucoup plus de commodités que sa voisine malienne. Eau potable et électricité y sont disponibles. Le poste de contrôle ne déroge pas à la règle de la tracasserie. La pratique est connue de tous. Même muni de notre carte de presse, nous sommes passés à la caisse. La tête du client ne compte pas. Tous « les étrangers » passent, à tour de rôle, chez le policier assis derrière un bureau métallique déjà menacé par la rouille. Le tiroir de gauche est rempli de petites coupures de Cfa. Une clameur attira l’attention tout près du portail d’entrée. Une jeune femme ne disposant pas de pièce d’identité doit être refoulée. Le policier sénégalais s’est montré intraitable. Par contre, le jeune Bissau-Guinéen, qui n’était pas enregistré à l’entrée, a réussi à négocier son cas.

Après avoir fait ce qu’il fallait pour franchir la frontière, le bus pouvait poursuivre sa route. Le convoyeur poussa un ouf de soulagement. A bord, un débat fort passionnant s’installa. L’insécurité qui frappe notre pays est décortiquée par les voyageurs. Les avis sont partagés entre l’incapacité des forces armées et de sécurité à assurer la quiétude, notamment à Kidal et un complot international dont le pays serait victime. L’incohérence des arguments développés ça et là met à jour la préoccupation profonde d’un peuple qui voit, impuissant, son destin manipulé par des puissances étrangères. Plus loin, un autre sujet s’invite dans les conversations tous azimuts: les tracasseries routières.

PASSAGERS EXASPÉRÉS. Sur la route les multiples contrôles d’identité provoquent l’ire des passagers. Là au moins, les intervenants au débat sont tous d’accord que ces contrôles n’obéissent à aucune exigence de sécurité. « C’est pour soutirer de l’argent sans aucun reçu en retour. On paye au moins 5 fois avant la frontière », déplore un habitué du trajet. « La petite corruption est la cause profonde du sous développement en Afrique », renchérit Malick, un Sénégalais. Longeant le chemin de fer, on ne voit aucun train passer. Après la privatisation et la reprise des activités par Transrail, le transport ferroviaire est agonisant. Nous faisons une brève escale à Tambacounda, après 187 km de route. La « maisonnette » roulante s’immobilise à nouveau dans une petite gare routière. Comme à tous les arrêts, les vendeurs de cacahuète et de nourriture en tous genres prennent d’assaut le bus. Il y en a pour tous les goûts et toutes les bourses. Le café « Touba », à la saveur originale, est servi à tour de bras. L’inévitable boisson accompagne la moindre tartine. Rare moment de dégourdissement des jambes pour Moustapha. Taille moyenne mais un corps noir d’ébène plutôt athlétique, il continue à maudire les policiers maliens pour lui avoir extorqué, trois fois de suite, la somme de 1000 Fcfa. « Et moi qui paye de 1000 à 5000 Fcfa aux agents sénégalais, à tout bout de champs? », rétorque le convoyeur du bus. Quelques 637 km séparent la frontière, Kidira, de la capitale sénégalaise, Dakar. Pendant que le chauffeur principal ronfle comme un éléphant qui barrit, son assistant nous conduisit jusqu’à Kaolack. L’obscurité enveloppe la ville. Ici, les habitants ont la particularité d’avoir des dents jaunes, à cause de la forte présence du sel marin dans leurs alimentations. Sur le chemin de la capitale, des brigades mobiles de la police et de la gendarmerie récoltent quelques « recettes » auprès des véhicules de transport à immatriculation étrangère. A l’entrée, un gendarme s’est tout bonnement retiré dans son poste avec les documents du car. Les négociations durèrent plus d’une heure. Il était minuit, le chauffeur donna un vigoureux coup de frein à la gare routière de Pikine, en pleine banlieue dakaroise. Le mastodonte devait retourner dès le lendemain. Le bus, avec ses nombreux passagers, reste toujours du pain béni pour les services de sécurité sur le corridor Bamako-Dakar.

Envoyé Spécial

M. CISSE
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L’Essor N° 17187 du 17/5/2012

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