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Bombardement de Bounty : L’ONU accuse, la France dément, Assimi se terre
Publié le mercredi 31 mars 2021  |  malikile
Remise
© aBamako.com par A.S
Remise d`un hélicoptère Mi-35 à l`armée de l`air
Bamako, le 12 Janvier 2021, le vice Président de la transition, le colonel Assimi Goita a remis à l`armée de l`air, un hélicoptère de combat de marque russe de type Mi-35.
Comment


C

’était le 3 janvier 2021 quand la nou-
vellefit letourdu mondeet lebuzzsur

les réseaux sociaux : de nombreuses

personnes,environunevingtaineontétébom-
bardéeprèsduvillagede Bountydanslecer-
cle de Douentza au centre du Mali. Des

interrogations, tout naturellement, fusèrent
de toute part : qui a bombardé ? qui a été
bombardé ? Très rapidement, deux versions

contradictoiresontétéserviesàl’opinionpu-
blique malienne, aux défenseurs des droits

humains et à la communauté internationale.

Ce sont dirent les français, à travers notam-
ment le ministèredesForcesarméesdedan-
gereuxterroristesquiontéténeutraliséespar

la force Barkhane qui reconnait ainsi être à
l’originedestirssur lazone.Faux, retorquèrent
de nombreux ressortissants de Bounty : les
victimessontdescivilsquiparticipaientàune

cérémoniedemariage. Maislathèsedelaba-
vure,aucoûthumainextrêmementélevéainsi

lancéen’étaitpasacceptablepar laFrancequi

l’a rejeté fermement, « arguments militaires

» à l’appui. Après un long silence assourdis-
sant, le gouvernement du Mali, à travers le

ministèrede la Défense s’est ralliéàlathèse
françaisetoutenannonçant l’ouvertured’une
enquête « pour mieuxcomprendrece qui
s’est passé».
Personne, depuis, n’a ni observé, ni entendu
parlerd’uneenquêtedugouvernementmalien
tout accaparé par ses opérations de charme
enverslacommunautéinternationale. Maisle
dossiernepouvaitêtreainsienterréauregard
des témoignages des rescapés et surtout de

Médecins sans frontières à travers sa direc-
tricedesopérations Isabelle Defourny,qui, le

12janvierdernierconfiaitaujournalLe Monde

« Des hommes, dont un blessé, sontar-
rivés lundi matin au centre de santé de

référence de Douentza,où MSFtravaille.
Ils nous ont dit être des villageois de

Bombardement de Bounty :
L’ONU accuse, la France
dément, Assimi se terre
UNE

MALIKILÉ - N°822 du 31/03/2021 Quotidien d’information et de communication 5
Bountiet nousont raconté quelaveille,
alors qu’ilsassistaientà unmariage, ily
avait eu des frappes aériennes dans ce

villagesituéau nord-est de Douentza,fai-
sant des morts, notamment desfemmes

et des enfants, et qu’il y avait encore

beaucoup de blessés. Ils nous ont de-
mandé del’aide pourlestransporter. Nos

équipesont décidé desoutenir lesauto-
rités locales pour réaliser ce transport

médicalen louant desvoitures. Une par-
tie des blesséssetrouvaient danslevil-
lage voisin de Kikara, dont ils sont

originaireset qu’ilsauraientrejointaprès
avoirété blessés lors delacérémonieà
Bounti,sans que noussoyonsenmesure
deconfirmercetteinformation. Ce n’est
pas le personnel de MSF qui s’est rendu
à Bounti et dans ses environs, mais des

agents duministère delasanté.Lesvoi-
turessontrevenueslelundiau centre de

référence de Douentzaavecles huit bles-
sés,tous des hommes, dontcinq ont plus

de 60 ans. Ilsontété prisen chargeim-
médiatement.»

Finalement, c’est la Minusma, c’est-à-dire
l’ONU au Maliquiaannoncé,conformémentà

son mandat de protection des civils, l’ouver-
ture d’une enquête dont les conclusions ont

été rendues publiques hier lundi 30 mars, à

l’avant-veilledudépartdéfinitifdel’actuel re-
présentantspécialduSecrétairegénéral,ap-
peléàd’autres fonctions.

Sur le plan factuel, les conclusions de l’en-
quête de la Minusma réduisent totalement à

néant lesargumentset lalignededéfensedes
autorités françaises et maliennes. Procédant
de façon professionnelle dans le respect des

règles et standards internationaux en la ma-
tière les enquêteurs de l’ONU ont eu des en-
tretiens présentiels directs individuels avec

plusde115personnesetunecentainepar té-
léphone sans compter 200 autres personnes

lors de réunions groupées soit au total plus

de400entretiens-témoignages.Approfondis-
sant leursinvestigations, lesenquêteursdela

Minusmaaffirmentavoiranalysé«aumoins

150 publications, notamment des com-
muniqués et déclarations officiels, des

articles de presse, des déclarations et
positions d’autresacteurset dessources
ouvertesainsi que des photographieset
vidéosconcernant lafrappe de Bounty».
C’est au terme de cette enquête minutieuse

quela MINUSMAs’estsentie«enmesure de
confirmer la tenue d’une célébration de
mariage quiarassemblésur lelieu dela

frappe une centaine de civils parmi les-
quels se trouvaient cinq personnes ar-
mées, membres présumés de la Katiba

Serma. Au moins 22 personnes, dont
trois desmembres présumés dela Katiba

Serma présentssurlelieu du rassemble-
ment, ont été tuées par la frappe de la

Force Barkhane survenue le 3 janvier
2021 à Bounty. Sur les 22 personnes
tuées, 19 l’ont été directement par la
frappe dont 16 civilstandis quelestrois
autrescivilsontsuccombé dessuites de

leurs blessuresau cours deleurtransfè-
rement pour des soins d’urgence. Au

moins huit autres civils ont été blessés
lors delafrappe.Lesvictimessont tous
des hommesâgés de 23 à 71 ans, dont la
majorité habitait levillage de Bounty.»
Et comme pour lever tout doute et ôter tout

argument à ceux qui éprouveraient le besoin
deremettreleur travailencause, la MINUSMA
enfonceleclou:«L’équipe n’aconstatésur

lelieu del’incidentaucun élémentmaté-
riel qui aurait pu attester la présence

d’armesou de motostel qu’établi par le

rapport desexperts dela policescienti-
fique des Nations Unies.»

Mais, ilenfallaitsansdoutepluspouramener
le ministère français des armées à accepter
unebavure.Eneffet,dèsaprès lapublication
durapportdelaMINUSMA,ceministèrepublia

un communiqué annonçant que « Le minis-
tère des Armées maintient avec

constance et réaffirme avec force : le 3
janvier, lesforcesarméesfrançaisesont
effectué une frappe aérienne ciblant un
groupe armé terroriste identifié comme
tel.»
Pourdiscréditer le rapport onusien, leFrance
évoque pêle-mêle le fait aucune femme et
aucun enfant n’a été touché par ses frappes,

l’impossibilité de distinguer les sources cré-
diblesdesfauxtémoignagesd’éventuelssym-
pathisants terroristes ou d’individus sous

influence (y compris la menace) des groupes

djihadistes, le manque de rigueur du proces-
susdeciblageutilisé.Ellevaainsi jusqu’àre-
mettre encause la méthodologieutilisée pat

les Nations Unies.

En conclusion, le ministère français des Ar-
mées, «touten restant parfaitementou-
vert aux échanges avec l’ONU, dont le

rôle est indispensable, le ministère des

Armées ne peut considérer que ce rap-
port apporte une quelconque preuve

contredisantlesfaitstels que décrits par

les forces armées françaises. Le minis-
tère des Armées demeureévidemmentà

l’entière disposition del’ONU.»

L’affairedubombardementdepopulationsci-
viles à Bounti, on le voit n’est pas close. La

MINUSMAproposed’oresetdéjà« Au terme
de l’enquête, la MINUSMA recommande
auxautoritésmaliennesetfrançaises de
diligenter une enquête indépendante,
crédibleet transparenteafin d’examiner

lescirconstances delafrappeetson im-
pactsur la population civile de Bounty »

maisaussi « d’enquêtersurles possibles

violations du droit international humani-
taire et du droit international des droits

de l’homme et d’établir les différentes
responsabilités et d’octroyer le cas
échéant une réparation appropriée aux

victimes et aux membres de leurs fa-
milles.»

Enattendant l’image dela France risque encre
d’être un peu plus brouillée au Mali voire au
Sahel et ses contempteur sauront de nouveaux

arguments pour entretenir le sentiment anti-
français ambiant.

Moctar Sow
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