Hier, jeudi 20 octobre 2022, le Conseil national de transition (CNT) a adopté le Projet de loi portant militarisation de la Police nationale et de la Protection civile à hauteur de 111 voix pour, zéro contre et zéro abstention. Les travaux de la séance plénière étaient présidés par le président du CNT, Colonel Malick DIAW, en présence des autres membres du CNT ; du ministre de la Sécurité et de la Protection civile, Colonel-major Daoud Aly MOHAMMEDINE, qui défendait le texte et d’autres personnalités. Cette militarisation permettra aux forces de la Police Nationale et de la Protection Civile de participer davantage à la sécurisation des localités reconquises en vue du retour de l’Administration, des services sociaux de base et des populations déplacées.
Selon le rapporteur de la Commission de la Défense Nationale, de la Sécurité et de la Protection Civile, Moustapha SANGARE, les missions de la Police Nationale sont définies par le Décret N°04-470/P-RM du 20 octobre 2004 fixant l’organisation et le fonctionnement de la Police Nationale. En effet, dit-il, elle est chargée, entre autres, d’assurer la sécurité des personnes, de leurs biens et des institutions, de maîtriser les flux migratoires et de lutter contre l’immigration illégale.
A cela s’ajoute la lutte constante contre la criminalité organisée, la grande délinquance, la protection du pays contre les menaces extérieures et le terrorisme. Quant à la Protection Civile, ajoute-t-il, elle a pour mission d’élaborer les éléments de la politique nationale en matière de protection civile et de veiller à la mise en œuvre de cette politique.
A cet effet, elle est chargée, entre autres d’organiser, de coordonner et d’évaluer les actions de prévention des risques et de secours en cas de catastrophes ; de participer aux actions en faveurs de la paix et d’assistance humanitaire. «Au regard de la situation sécuritaire et des défis multiples auxquels les Forces de Défense font face, il a été souverainement recommandé lors des Assises Nationales de la Refondation, tenues les 27, 28, 29 et 30 décembre 2021, de militariser la Police Nationale. Or la Direction Générale de la Protection Civile constitue le deuxième segment du Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile avec la Police Nationale. Cette militarisation de la Police Nationale et de la Protection Civile concoure à la réalisation des objectifs de la refondation de l’Etat », a déclaré le rapporteur de la commission saisie au fond.
Par ailleurs, il faut noter que le projet de loi portant militarisation de la Police nationale et de la Protection civile comporte quatre articles répartis comme suit : l’article 1er annonce la militarisation de la Police nationale et de la Protection civile ; l’article 2 détermine la gestion des fonctionnaires de la Police nationale et de la Protection civile par le Statut général des Militaires en les plaçant sous l’autorité du Ministre en charge de la Sécurité ; l’article 3 annonce la relecture de l’Ordonnance n°2016-020/P-RM du 18 août 2016, modifiée, portant Statut général des Militaires; et l’article 4 annonce les dispositions finales.
« Ensemble, nous allons gagner cette guerre qui nous a été imposée »
Selon les personnes écoutées par la commission saisie au fond, ce projet de loi constitue une opportunité de soutien à l’effort de guerre. Le rapporteur, Moustapha Sangaré, a indiqué que le présent projet de loi va permettre de mettre en œuvre l’équité de traitement entre les Forces de Sécurité et les Forces Armées par l’harmonisation des grilles indiciaires ; d’établir et adapter les grades aux responsabilités hiérarchiques et fonctionnelles entre les Forces de Défense et de Sécurité ; de consolider les acquis liés aux catégories et paliers d’intégration ; d’organiser la formation des unités d’élite en s’inspirant des Forces Armées ; de maintenir la discipline et faire cesser les actions syndicales intempestives ; d’engager ces forces dans des situations opérationnelles encore plus risquées. « Par rapport à l’insuffisance des hommes, cette militarisation permettra d’étoffer les effectifs des Forces de Défense et de Sécurité pour un maillage du territoire national. Il faut rappeler que par le passé, des dérives ont été constatées dans l’exercice du droit syndical au niveau de la Police Nationale et de la Protection Civile, avec souvent comme conséquences de perturber, sinon d’empêcher l’exécution des missions de service, ce que les défis sécuritaires de l’heure ne sauraient permettre », a-t-il dit.
Pour lui, cette militarisation permettra aux forces de la Police Nationale et de la Protection Civile de participer davantage à la sécurisation des localités reconquises en vue du retour de l’Administration, des services sociaux de base et des populations déplacées. «Sur cette base, les Forces de Sécurité engagées en opération, bénéficieront des mêmes avantages que les autres militaires (médaille commémorative de campagne, indemnité forfaitaire décennale, prime d’opération, etc.). Ce processus de militarisation de la Police Nationale et de la Protection Civile, bénéficiera d’un soutien logistique déjà constitué grâce aux efforts consentis par l’Etat à travers la LPSI (Loi de Programmation de la Sécurité Intérieure), qui a permis à ces différentes forces de Sécurité de bénéficier de matériels roulants, de moyens d’intervention, d’équipements, d’infrastructures, etc. », révèle la commission présidée par Minkoro KANE.
En outre, la commission évoque que la détermination des modalités et conditions d’intégration des fonctionnaires de la Police Nationale et de la Protection Civile dans le Statut général des Militaires permettra de dégager l’incidence financière de ce projet de loi. Après analyse et examen approfondis du présent projet de loi, la Commission de la Défense Nationale, de la Sécurité et de la Protection Civile recommande fortement au Gouvernement de mettre en place une commission ad ‘hoc inclusive qui sera chargée de gérer les aspects techniques du changement de statut ; d’organiser des formations adaptées au profit des unités de Police Nationale et de la Protection Civile ; de doter la Police Nationale et la Protection Civile de moyens appropriés à leurs nouvelles missions ; de préserver les acquis liés aux spécificités distinctives de la Police Nationale et de la Protection Civile.
Après la lecture du rapport de la commission saisie au fond, s’en est suivi des débats. Ainsi, certains membres du CNT ont voulu savoir si la démocratie rime avec une police militarisée. Tandis que d’autres se sont focalisés sur la conservation des acquis, l’harmonisation des grades, la suppression des syndicats. En réaction aux préoccupations des uns et des autres, le président de la commission saisie au fond, Minkoro KANE, a fait savoir que cette militarisation de la police n’est rien d’autre qu’un rajout de missions aux missions classiques de la police. Répondant à celui qui a dit que la démocratie ne rime pas avec une police militarisée, il fait savoir que les Etats-Unis d’Amérique, pays de démocrates, ont militarisé leur police en 1965, en 2001. Pour lui, cette militarisation va permettre à la police de tenir les zones nettoyées par l’armée.
Quant au ministre de la Sécurité et de la Protection civile, Colonel-major Daoud Aly MOHAMMEDINE, il dira que si le peuple dit de militariser la police, ça se fera. Il a précisé que le statut général des militaires sera réélu et prendra en compte la police et la protection civile.
A l’en croire, la police aura les mêmes équipements que les militaires. A ses dires, il n’y aura pas d’injustice.
Après les débats, le Projet de loi portant militarisation de la Police nationale et de la Protection civile a été adopté par le CNT à hauteur de 111 voix pour, zéro contre et zéro abstention. Très réjoui de l’adoption du texte, le ministre a fait savoir que c’est une loi historique et hautement patriotique. Il a souhaité la bienvenue à la police et à la protection civile dans la grande famille des militaires. « Ensemble, nous allons gagner cette guerre qui nous a été imposée », a conclu le ministre.