Les attaques terroristes simultanées contre l’Ecole de gendarmerie de Faladié et l’aéroport international Président Modibo Kéita-Senou méritent qu’on s’y attarde, quel que soit le bilan humain et matériel. Le fait est inadmissible, au double plan de l’acte terroriste injustifiable, et de la légèreté déconcertante qui a caractérisé en amont, la gestion quotidienne de la sécurité collective dans la capitale. Que cette légèreté soit l’expression d’une négligence ou celle d’une situation permissive tolérant quelque complicité interne avec les terroristes.
Le réveil des Maliens est brutal de faire le constat accablant que la sécurité de l’Etat n’est pas tenue à la hauteur d’un pays en guerre. N’importe quel Etat sérieux, disposant d’un service de renseignement digne de ce nom, doté des moyens humains et matériels, aurait pu être renseigné en amont des attaques. Dans un Etat qui évite les surprises désagréables de ce genre, les agents de renseignement ne sont pas uniquement des hommes en veste-cravate, souliers bien cirés. Ils sont recrutés aussi parmi les cireurs de chaussures, les chauffeurs de camion, les taximen, les maçons, les photographes, les artistes, les fidèles de la mosquée, de l’Eglise, les oisifs baladeurs, les marchands ambulants, pas uniquement des policiers. C’est ce qui a permis ou largement contribué à ramener la sécurité dans un pays voisin du nord, dont la situation était bien pire que la nôtre, il n’y a pas très longtemps.
Les Maliens s’interrogent sur la sensibilité des autorités sécuritaires à établir une juste proportion entre l’intensité des bombardements nourris sur Tinzaouatène et la nécessité de relever les défis sécuritaires dans les zones de production dont les villes maliennes, les zones de l’Office du Niger, du sud cotonnier et des sites miniers.
Des questions restent en suspens : Comment cela a pu arriver avec une telle facilité ? Y a-t-il eu excès de confiance, négligence ou manque de moyens des autorités sécuritaires ? Un pays en guerre, comme le nôtre, qui a opté pour la guerre de souveraineté, peut-il se permettre une telle légèreté dans la conduite de la sécurité de l’Etat, des lieux sensibles comme l’école de Gendarmerie ou l’Aéroport? Quoi qu’on dise, les terroristes ont atteint leurs cibles en plein cœur de Bamako. Hier, c’étaient les magasins de munitions de Kati, qui étaient visés, quelle sera la cible demain ? En attendant, les ministres de la Sécurité et de la Protection civile, le Directeur général de la Sécurité d’Etat (DGSE) doivent rendre des comptes au chef de l’Etat, et que le peuple soit pris à témoin. Chaque centime des maigres moyens de l’Etat mobilisés pour la sécurité individuelle et collective, doit être utilisé à bon escient.
La coïncidence de ces évènements douloureux avec le procès de l’avion présidentiel (dont l’appareil aurait été pris pour cible à l’aéroport), le premier anniversaire de la signature de la charte de Liptako Gourma portant création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) dont le Mali assure la présidence, et la célébration de Maouloud, est assez troublante. Le procès et son objet (l’avion présidentiel), l’AES et Maouloud sont-ils collégialement ciblés ? Les autorités de Bamako ne doivent-elles pas inspirer un dialogue avec les leaders et guides religieux afin que l’anniversaire du baptême du prophète soit célébré dans la sobriété sans grand attroupement de foule ? Les guides religieux sont souples et compréhensifs et pourraient concéder.