Leur survie est menacée par l’envahissement de leur milieu naturel par les bovins «sahéliens». L’élevage occupe une place très importante dans l’économie du pays. En effet, le Mali se caractérise par la diversité de son cheptel en nombre et en qualité. Il occupe la deuxième place dans l’espace CEDEAO après le Nigeria sur les effectifs du cheptel. Le cheptel bovin est assez important et son aire de pâturage s’étend du nord vers le sud du pays. Toutefois, la zone sud du pays (notamment dans les régions de Koulikoro, Sikasso et Kayes) se caractérise par la présence d’une espèce unique de cheptel adapté à cet agro-climat dont la race bovine N’Dama, la chèvre naine et le mouton djallonké.
La zone de prédilection de ces animaux est le sud des régions de Sikasso, Koulikoro et Kayes, où l’humide subsiste toute l’année en raison du couvert végétal abondant et elle se caractérise aussi par la présence de mouches tsé-tsé. La race N’Dama est réputée comme une espèce tolérante à la trypanosomiase, cette maladie transmise par les piqûres des glossines (mouches tsé-tsé) qui infestent ces zones.
Ainsi, du fait, des effets combinés de plusieurs facteurs comme la pression démographique, les changements climatiques, la sécheresse et de l’action anthropique, dont la déforestation due à l’accroissement des besoins en bois de chauffe, l’extension des emblavures dues à l’agriculture itinérante, les feux de brousse, etc, de plus en plus, du bétail allochtone envahit l’habitat naturel du bétail ruminant endémique. Cet envahissement a pour conséquences, la réduction de son aire d’évolution et l’érosion progressive de ses caractéristiques génétiques alors que concomitamment, on constate la dégradation des écosystèmes. Le Projet régional de gestion durable du bétail ruminant endémique en Afrique de l’Ouest (PROGEBE-AO) est financé conjointement à hauteur de 5.695.969.000 Fcfa pour une durée de 7 ans (2008-2014) par la Banque africaine de développement (BAD), le Fonds mondial pour l’Environnement (FEM) et les gouvernements concernés.
Il est né de la volonté commune des pays comme la Gambie, la Guinée, le Mali et le Sénéga. Il a pour but de préserver, voire renforcer durablement les caractéristiques génétiques du bétail endémique, accroître sa productivité et sa commercialisation dans un environnement institutionnel favorable, a précisé le Dr Ousmane Traoré, coordinateur national du PROGEBE. Un animal adapté à la zone humide. Le concept « bétail ruminant endémique », explique Ibrahim Traoré, expert en production et industrie animale du PROGEBE, correspond à un ensemble de populations animales particulièrement adaptées aux conditions écologiques prévalant dans la zone sub-humide.
Ces animaux portent, outre les gènes qui leur confèrent une grande résistance aux maladies présentes dans cette zone, telles la trypanosomose, les endoparasitoses et les dermatophiloses, possède d’autres attributs spécifiques qui leur permettent de s’adapter à des températures et à des taux d’humidité élevés, et une aptitude de transformation de fourrages pauvres. Le projet contribuera à la préservation de la biodiversité par le maintien de 90% de bétail ruminant endémique parmi les ruminants de la zone d’habitat naturel de cette espèce, la sécurité alimentaire et à la réduction de la pauvreté par un meilleur approvisionnement des populations en produits alimentaires et l’accroissement des revenus. Il vise à préserver les caractéristiques génétiques du bétail ruminant endémique, à améliorer la productivité, à relever le taux d’exploitation du bétail ruminant endémique, à promouvoir la gestion communautaire et durable de l’écosystème naturel du bétail ruminant endémique.
Les caractéristiques comparatives évidentes de la race N’Dama sont entre autres, en plus du fait qu’elle est trypano-tolérante, c’est la qualité de la viande qu’elle produit. En effet, la graisse de l’animal est répartie entre les parties de la chair et n’est pas formée de couches entassées sur des régions de carcasses comme pour les autres espèces bovines (zébu maure ou peul). Aussi, le taux de viande produit par l’animal est proche de 50% de son poids vif contrairement aux espèces de même type, assure Ibrahim Traoré. La lactation peut atteindre les 3 à 5 litres par jour contrairement à ce que les uns et les autres peuvent penser de la vache N’Dama en la caractérisant de peu productive. L’espèce ne peut vivre que seulement en milieu humide et nulle part ailleurs. Elle ne supporte pas le climat sahélien.
Ce qui fait qu’elle est d’un apport inestimable pour le paysan qui dispose d’un animal de trait adapté à la zone humide. La présence en permanence des espèces de bovins (zébu maure et peul) dans son aire d’évolution constitue une menace pour la survie de l’espèce. En effet, les troupeaux du nord qui arrivent en transhumance à la recherche de pâturage ont de plus en plus tendance à se sédentariser en raison de la dégradation de son habitat naturel (déforestation, feux de brousse, défrichement massif à la recherche de champs plus fertiles). QUELQUES RÉALISATIONS. Cette présence massive engendre des croisements avec les espèces du nord et tend à dégrader le tissu génétique de la N’Dama.
Toutefois, précise Ibrahim Traoré, le Projet est arrivé dans certaines zones d’intervention à maintenir un certain taux de croisement avec les espèces du nord, cela en vue de préserver l’animal dans son entité génétique intrinsèque. La zone d’intervention du projet comprend le site de Madina Diassa (cercle de Yanfolila), le site de Manankoro (cercle de Bougouni), le site de Tousséguéla » (cercle de Kolondiéba) et un site primaire situé dans la région de Kayes celui de Sagabary qui couvre la commune rurale de Gadougou I. Les sites secondaires retenus sont les communes rurales de Koundian (cercle de Bafoulabé) dans la région de Kayes et de Nouga-Benkady (cercle de Kangaba) dans la région de Koulikoro. Les principales réalisations prévues sont, entre autres, la caractérisation du bétail ruminant endémique et de son environnement, la réhabilitation et l’équipement du Centre de Madina Diassa, la mise en place de 40 troupeaux villageois de multiplication afin de favoriser l’accès des agro-éleveurs à des reproducteurs sélectionnés.
La formation de 25 auxiliaires vétérinaires, la formation de 10 techniciens d’élevage, la formation de plus de 2.400 éleveurs, dont 400 femmes dans divers domaines (alimentation, santé animale, gestion de la reproduction et amélioration de l’habitat des animaux), l’aménagement d’infrastructures de commercialisation et de transformation du BRE et de ses produits par la réalisation de 5 marchés à bétail, de 6 aires d’abattage et de 3 mini-laiteries équipées, le renforcement des capacités organisationnelles et institutionnelles des OP et la réalisation de 9 points d’eau pastoraux.
M. COULIBALY