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Art et Culture

Aminata Dramane Traoré, ex ministre de la culture : ‘’ L’ancrage culturel au Mali est mis en mal par des difficultés économiques’’
Publié le jeudi 27 novembre 2014  |  Le Républicain




Le Républicain : Que pensez-vous du dialogue interculturel nord-sud au Mali ?

Aminata Dramane Traoré : S’il faut considérer la culture comme un système de valeurs et de référents, il est clair que chaque pays est composé de plusieurs groupes qui parlent différentes langues et se comprennent parce qu’il y’a des fondamentaux. Ils ont des repères en commun, en partage. Dans l’ensemble, même si vous n’avez pas les mêmes références culturelles, vous aurez trouvé chez l’autre la même humanité de principe et de pratique qui font que vous n’êtes pas étranger l’un à l’autre. Ne pas être étranger l’un à l’autre même quand vous ne parlez pas la même langue, vous comprenez que l’autre est d’abord un humain surtout que la culture est la principale caractéristique de tout être humain.

On considère que vous savez respecter chez l’autre, sa différence, ses repères. Donc de ce point de vue, on peut parler de dialogue culturel même si c’est beaucoup compliqué parce que la notion de dialogue suppose qu’on l’instaure de manière délibérée pour régler un problème, c’est ça qui amène les gens à parler de dialogue nord-sud mais il n’y’a pas de rupture. Ce n’est pas un problème de dialogue en tant que tel. Une somme d’incompréhensions, de malentendus, du fait de la distance, du fait de problèmes qu’on n’a pas pris le temps de diagnostiquer. On fini par se rejeter, mais ce n’est pas lié à des différences culturelles nécessairement parce que nous revendiquons beaucoup de choses matérielles et immatérielles, en partage avec nos frères du nord.

Selon vous, quel doit être le rôle du dialogue interculturel dans le processus de réconciliation nationale ?

De mon point de vu. Si on veut chercher les dimensions culturelles de ce conflit. Ce n’est pas parce qu’il n’y’a pas dialogue. Ce n’est pas parce qu’on ne se reconnait pas. Mais, parce qu’on s’est trouvé dans des situations économiques, politiques, institutionnelles conflictuelles. Ce sont à ces questions qu’il faut s’attaquer. Je privilégie dans ma lecture de ce conflit, les dimensions économiques que beaucoup de gens évacuent. Les gens au nord, mais au sud, dans l’ensemble du pays comme partout ailleurs, aujourd’hui sont confrontés à des difficultés économiques extrêmes considérables. Alors si vous ne voulez pas aborder la question de l’économie, de quoi les gens vont vivres. Quand vous prenez le secteur de l’artisanat et du tourisme bon an mal an, les gens parvenaient à s’en sortir. Ce n’était pas considérable ce que les gens du nord gagnaient dans l’artisanat et le tourisme, mais ça leur permettait de survivre. Et, voilà qu’ils n’ont plus cette possibilité. Depuis 2008, le pays est sur la liste des pays à risque. Donc cette possibilité de se prendre en charge n’existe plus, les gens perdent pied.

Que préconisez-vous donc ?

Maintenant dialogue culturel d’accord, mais imaginons des économies locales qui permettent au gens de vivres dignement. Quand les gens perdent leurs dignités, quand ils ne savent plus sur quoi prendre appui, ils prennent des armes. Mois, je crois que l’ancrage culturel est-là. Il est mis en mal par des difficultés économiques qu’il ne faut pas occulter.
Propos recueillis par Aguibou Sogodogo
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