Le monde entier s’est interrogé pendant longtemps. Les Maliens savent-ils ce qu’ils veulent ? Les 2/3 du pays sont occupés et l’armée n’est pas suffisamment équipée pour faire face à l’ennemi et des Maliens (surtout du côté de Kati) ont pu refuser l’intervention de la Cedeao pour botter les fesses des groupes armés qui sèment la terreur et la désolation dans la partie septentrionale du Mali. C’est désormais une question résolue : la Cedeao peut installer son quartier général à Bamako, la capitale. N’eut été cette décision, la Cedeao ne pourrait en aucun cas, intervenir militairement au nord. Mais pourquoi ?
Tout d’abord, il est important de souligner les incongruités de l’amateurisme et de l’improvisation des autorités de la transition dans leur position affichée de récuser les troupes de la Cedeao à Bamako sans tenir compte des contraintes objectives et absolument nécessaires à la réalisation de leurs missions au Mali. A cet effet, il est important de rappeler que le Mali ne disposant pas d’une capacité totale de stockage du jet A1, le kérosène, utilisé par les avions de combat, il pourrait difficilement rendre opérationnel la flotte aérienne basée à Bamako. Baser les troupes vers la ligne de front et opérer à partir d’une base délocalisée s’avéreraient matériellement impossible pour l’aviation de la Cedeao. Car, la capacité de stockage des produits aviation disponibles à Bamako est d’environ 3.530.000 litres. Cette précarité des capacités de stockage notoirement insuffisantes pour satisfaire la plateforme aéroportuaire de Bamako pousse régulièrement la direction de l’aéronautique du Mali à régulièrement lancer un « Notam », ce qui signifie dans le langage technique que les produits ne sont pas disponibles sur un aéroport.
Il est rare que le Mali observe plus d’un mois sans notifier aux compagnies l’impossibilité de ravitailler les avions à Bamako.
En évaluant la flotte en direction de Bamako, qui deviendra avec le démarrage des opérations militaires un «Hub», aucune opération militaire ne pourrait être menée à son terme au Mali. Pour information, le dépôt aéroport de Mopti (dont du côté de Kati, on exigeait que la Cedeao installe son état major) s’il doit être retenu pour servir de base logistique, ne dispose que de 500 mille litres de stockage, ce qui est notoirement insuffisant pour assurer une base logistique d’une flotte de cette envergure.
Les aspects éminemment stratégiques liés aux produits aviation dont les camions de transport sont spécialisés (exclusivement affectés au transport de ces produits) et qui nécessitent une analyse à chaque réception de produits issus d’un lot de chargement différent. Ces lots changent de jour en jour au niveau des ports de chargement. En somme, les goulots d’étranglement sont immenses et impossibles d’être limitativement énumérés.
Ces difficultés de stockage et d’approvisionnement évoquées dans cette analyse diagnostique sont valables pour tous les autres produits pétroliers à cause de la continentalité du pays et du faible niveau des capacités de stockage.
Ces difficultés sont encore plus grandes et plus préoccupantes pour l’Avgas, produit aviation spécial utilisé par les hélicoptères de combat et dont la source d’approvisionnement se trouve hors du continent africain. En d’autres termes, pour assurer le ravitaillement de la flotte héliportée, il faut passer une commande en Europe et observer un délai d’approvisionnement minimal de 21jours. Les contraintes sont perceptibles au niveau de tous les approvisionnements du pays. Même assurer le paiement des salaires et des factures des troupes de la Cedeao serait quasi impossible, vu le flux monétaire que cette opération nécessiterait. La Cedeao, faute de banques ou de liquidités à Ségou ou à Sévaré pourrait se retrouver complètement paralysée. Et à défaut du carburant nécessaire, les troupes opérationnelles au lieu de progresser sur le terrain se verront forcées de procéder à un reflux, autrement dit «repli tactique» particulièrement grave pour la survie des hommes et la défense des territoires non encore occupés.