Aujourd’hui, l’insécurité a atteint son paroxysme. Mais le Président de la République est invisible là où il doit être vu. Il est aussi inaudible. On se contente des communiqués de condoléances du porte-parole du gouvernement qui commencent à crever les tympans des citoyens.
La gestion de la crise sécuritaire est sans nul doute un des facteurs qui a favorisé l’élection d’Ibrahim Boubacar Keïta à la tête du Mali. Car, outre l’image d’homme d’Etat, intègre et sans pitié face à l’ennemi qu’il s’est forgée, son slogan de campagne était aussi attractif. Il s’agit de « Pour l’honneur du Mali et le bonheur des Maliens, le Mali d’abord». Au cours de ces différents meetings de campagne, il avait promis d’infliger aux fauteurs de troubles les sanctions à hauteur de leur forfaiture. Pour rappel, au lancement de sa campagne présidentielle, il affirmait : «Désormais, aucun groupe terroriste ou criminel ne franchira la frontière du Mali sans trouver devant lui les forces armées nationales en position de combat». En vertu de ce discours de bonne intention, bien beau à entendre, les Maliens ont cru en IBK. D’où son score à la soviétique avec plus de 77% à l’issue de l’élection.
Mais une fois au pouvoir, la réalité semble être toute autre. On commence à voir un autre IBK à l’œuvre. Lui qui avait annoncé qu’il ne se hissera jamais à la hauteur d’un rebelle pour discuter d’égal à égal autour d’une table de négociation a fini par se faire représenter par Modibo Keïta, l’actuel Premier ministre, aux discussions d’Alger. Toutefois, cette capitulation a abouti à la signature d’un accord pour la paix qui peine à être appliqué. Pire, le pays est embrasé, l’insécurité qui était jusqu’à présent contenue dans les régions du nord se généralise. Aucune région du Mali n’est épargnée.
A chaque jour, son lot de malheur. Ces derniers mois, les terroristes contredisent la promesse électorale d’IBK. Ils sont partout au Mali, surprenant presque chaque fois l’armée qui n’est pas en position de combat. Les attaques deviennent quasi quotidiennes. Après celles de Nara, de Misseni, de Fakola au sud du Mali, les terroristes sèment à nouveau la terreur au nord et au centre du pays. Dans le seul mois d’aout, ils ont attaqué plusieurs localités. Le 3 août, ils ont frappé le camp militaire de Gourma Rharous causant la mort de 11 de nos soldats. La veille, le 1er août, ils avaient assailli nos forces armées sur l’axe Nampala-Diabaly faisant 2 morts. Avant qu’on ne finisse de faire le deuil de ces soldats, le vendredi 7 août, les terroristes ont tenté d’attaquer un camp militaire à Sévaré avant de se retrancher dans un hôtel face à la résistance de l’armée malienne. Là encore, ils ont fait une prise d’otages qui s’est soldé par un carnage. On dénombre plus de 15 morts dont 4 du côté de nos forces armées. Le lendemain, ils ont signalé leur présence aux environs de Bamako en attaquant la gendarmerie de Baguinéda, situé à 30 Km de la capitale faisant d’importants dégâts matériels. Dans la même foulée, les « fous de Dieu » ont assassiné une dizaine de personnes dans le village de Gabérie, dans le cercle de Gourma Rharous. Encore le lundi 10 août, l’armée a perdu 3 de ses éléments dans l’explosion d’une mine au passage de leur véhicule dans le cercle de Ténenkou.
En dépit de cette tragédie que vit le pays, le gouvernement continue curieusement sa vacance. C’est vrai que le ministre de la Défense s’est rendu à Sévaré pour rendre hommage aux vaillants soldats tombés sur le champ de l’honneur, mais au regard de la gravité de la situation, le peuple s’attendait à la présence du Chef suprême des armées sur les lieux. Mais, visiblement, il préfère les zones plus ou moins sécurisées. Il a choisi Koulikoro pour célébrer la sortie de la promotion Koké Dembélé de l’Emia (Ecole militaire interarmes).
Faut-il le rappeler, il a fallu que l’opposition critique le régime pour que le Chef de l’Etat donne l’impression que la question militaire demeure sa principale préoccupation. Ainsi, il s’est rendu le weekend dernier, à Kati, au chevet des militaires blessés de Sévaré, où il a remis à l’armée des corbillards, pardon, des ambulances. A part cela, le citoyen malien se contente de compter ses morts tous les jours. Et de méditer sur les communiqués de condoléance du gouvernement qui commencent à tympaniser les oreilles.
De toutes les façons, force est de reconnaître que les Maliens ne sont pas satisfaits de la gestion de cette crise sécuritaire. A la place des communiqués de condoléances, ils veulent des actions visant à équiper nos soldats afin que cessent les décomptes quotidiens de nos morts.
Oumar KONATE