Installé maire de la commune urbaine de Sikasso rêve d’une commune plus viable, plus modernisée, mais surtout qu’elle devienne un pôle économique vers lequel se tournent tous les regards des trois pays frontaliers. Dans cet entretien qu’il a bien voulu nous accordé, il parle de ses premiers sentiments et de ses priorités pour Sikasso.
Aube d’Afrique : Comment vous vous sentez, après cette élection comme maire de Sikasso ?
Kalfa Sanogo :« C’est un sentiment de fierté et de joie qui m’anime en ce moment. De mémoire de Sikassois qui vivent en cours, depuis les joutes électorales du temps colonial à nos jours, il n’y a pas eu une telle mobilisation. C’était tout simplement incroyable. Ce que j’ai retenu, c’est que cet appel qui m’a été lancé depuis la base, pour venir aider à gérer la cité, constitue pour moi un honneur. J’en suis fier, parce que pendant la campagne, partout, la population a dit que ce n’est pas une question de partis, mais que c’est une question de personne. C’est une question d’homme. Les 64 % des Sikassois qui ont voté pour la liste que j’ai conduite, ne sont pas forcément issus seulement de l’alliance, tout comme les élections présidentielles en 2013, les 77,8 % de Maliens qui ont voté pour IBK ne sont pas uniquement du RPM. Il y a peut-être que 5% ont qui sont RPM, même si après les gens ont beaucoup spéculé. Aujourd’hui, ce fut la même chose à Sikasso. Les gens en fait la même chose pour notre liste. D’aucuns qui n’ont jamais voté se sont rendus pour la première de leur vie aux urnes pour élire notre liste. J’en tire une légitime fierté. Je me suis reconnu étant chez moi, mais c’est en même temps aussi une grande interpellation. Nous n’avons pas droit à l’erreur. Nous n’aurons pas droit à l’erreur, toute l’équipe qui a été élue. C’est pourquoi, il y a des choses qui se faisaient, qui ne se feront pas, dans la mesure où on nous attend, dans la mesure où nous avons suscité un espoir. Nous n’aurons pas le droit de décevoir cette population qui nous a fait confiance ».
Aube d’Afrique : Quelles seront vos priorités ?
Kalfa Sanogo :« Je ne suis pas un magicien. Donc le projet, c’est celui de Sikasso et des Sikassois. Il y a des grands, mais nous allons définir concrètement ensemble les actions à mener, mais surtout nous allons chercher ensemble les moyens pour y parvenir. Les moyens sont internes et externes. Vous ne pouvez pas demander à des gens de venir vous aider si vous ne les montrer pas que vous êtes au sérieux. En ce moment vous les inspirer confiance. Vous pourrez attirer d’autres volontés. La première des choses, c’est la mobilisation citoyenne. Il faut que Sikasso montre ce qu’elle a comme volonté. Ce n’est pas par la bouche, mais de façon concrète. On rationnalise cela. Il n’ya pas de raison qu’ils ne se donnent des moyens moraux pour aller à recherche de vrais partenaires. Pour être clair, nous allons mobiliser les ressources propres de chez nous. Je ne dis pas que les ressources de chez nous sont extraordinaires, mais elles sont importantes. Sikasso est un pôle économique extraordinaire. Chaque semaine, il part du petit marché de Médine, au minimum 50 à 60 grandes remorques pleines de fruits et produits de terres, vers toutes les directions, au Sénégal et jusqu’en Gamby. Il y a des potentialités économiques extraordinaires. Pour le grand marché, il y a plein d’infrastructures à gérer. Il y a des ressources qui sont générées localement. Je ne connais le montant, mais je suis convaincu que les ressources générées dans l’année peuvent servir de pompe pour amorcer de choses importantes. C’est cela que nous allons essayer de faire d’abord. Après ça, on peut songer à demander à d’autres de venir nous aider. Comme dit l’adage bambara, si tu veux qu’on aide à tuer ta bête féroce, il faut que tu en tiennes la tête d’abord. Il faut qu’on aboutisse d’abord à ce réarmement moral de la population par la façon dont nous allons commencer la gestion. Le sérieux, la rigueur et le rationnel que nous allons mettre dans la gestion de ce que va être produit localement comme ressources, nous permettront d’aller vers d’autres partenaires. Bien sûr, il ya des projets que le gouvernement a déjà négocié depuis de longues dates, il faut nous ayons les capacités de mobiliser ces ressources-là. Je pense au projet PACUM (projet d’appui aux communes urbaines du Mali), qui est en train d’être exécuté à Sikasso, comme à Ségou. Sikasso est en retard dans ce projet. Le ministre Dramane Dembélé, alors membre du gouvernement, lors d’une de ses visites avait même dit d et qu’il allait retirer les fonds destinés à Sikasso si elle ne faisait pas preuve de lus d’engagement, en accélérant les travaux. Il y a aussi le projet de la BAOD, pour l’agrandissement des voies afin d’améliorer la fluidité de la circulation. Il y a d’autres projets de la banque mondiale. Nous allons voir comment faire en sorte que ces projets puissent donner les meilleurs d’eux-mêmes pour le développement de la cité. Ni moi, ni personne ne va se taper la poitrine pour dire que c’est lui qui a amené ça ici. On va faire en sorte pour décaisser les fonds et les mettre au profit de la commune ».
Aube d’Afrique : A quoi Sikasso pourrait ressembler à la fin de votre mandat ?
Kalfa Sanogo :« C’est une question délicate. Je rêve comme tout être humain, d’un Sikasso luxuriant, resplendissant. Je rêve d’un Sikasso qui attire non seulement une bonne partie de la République du Mali, mais aussi des pays voisins. Sikasso est comme une sorte de triangle qui se trouve entre le Mali, la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. La ville était le centre de développement du royaume du Kénédougou. Cette position géographique devrait être un atout pour son développement économique et universitaire. Je pense toujours à l’amélioration de la formation. Sans formation sérieuse pour les jeunes, on ne peut pas véritablement combattre le chômage. L’un des grands problèmes de Sikasso tout comme toutes les autres villes du Mali, c’est que le niveau de la formation à tous les niveaux laisse à désirer. Ce n’est pas la faute de la jeunesse, parce ça remonte un peu loin. Le système de la formation est à changer. En attendant, on a des gens sous la main. Si on ne met pas ces gens dans une autre formation, on ne peut pas avoir des résultats. Comme l’Etat a des limites de l’utilisation des hommes formés. Les communes ont des limites. Faisons en sorte que l’activité économique soit redynamisée, que des investisseurs viennent, pour améliorer l’emploi. C’est un défi que nous devons relever. Cela ne peut pas se relever en seul jour. Il faut qu’on commence cela résolument. Le problème de l’emploi n’est pas typiquement malien, mais il est mondial. Le problème de l’emploi n’est pas typiquement Sikassois, mais il est Malien. Le problème de François Hollande a été toujours à l’emploi. J’admire les hommes politiques qui disent qu’ils vont créer 50.000 emplois. Mais pour cela, il faut de la magie. Il faut créer les conditions pour que l’emploi soit créé. Il ne s’agit pas d’aller encombrer les bureaux par des jeunes volontaires de l’APEJ qui ne savent pas quoi faire. C’est une façon de se voiler la face. Il faut qu’on commence à se dire certaines vérités. Il nous revient de renforcer et de valoriser les centres de formation comme le CFP, pour former des ouvriers spécialisés, afin d’éviter qu’on importe. Nous sommes dans un système de mondialisation où la compétition devient de plus en plus rude. Si on veut amorcer un développement à long termes, il faut toujours un départ pour aller de l’avant. Pour la réalisation de tous ces projets, nous avons besoin des bénédictions des parents, de l’accompagnement des autorités et de nos partenaires ».
Entretien réalisé par Jean Goïta, depuis Sikasso