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4e audience publique de la commission vérité, justice et réconciliation : Des victimes des différentes crises de 1960 à nos jours ont publiquement fait savoir les violations qu’elles ont subies
Publié le samedi 25 septembre 2021  |  Aujourd`hui
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La Commission vérité, justice et réconciliation (Cvjr) a organisé, le samedi 18 septembre 2021 au Cicb, sa 4e audience publique pour écouter des victimes des différentes crises, des rebellions et des coups d’Etat survenus au Mali de 1960 à nos jours, en vue de faire des enquêtes non judiciaires et établir la vérité sur les violations des droits de l’Homme et de proposer des mesures de réparations, de restauration sociale, de réconciliation. Au cours de l’audience, 13 victimes ont pu témoigner devant la Cvjr et le ministre de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale, chargé de l’Accord pour la paix Réconciliation nationale, colonel-major Ismaël Wagué qui a assisté à la cérémonie.


Les premières victimes à comparaître à la 4e audience publique étaient Gaoussou Diarra (enseignant), Me Mariam Diawara (avocate) et Aboubacar Sissoko (écrivain), tous héritiers de 40 compagnons et collaborateurs du président Modibo Kéïta. Leurs témoignages ont porté sur l’arrestation de leurs parents à la suite du coup d’Etat de 1968 perpétré par le Comité militaire de libération nationale dirigé par le lieutenant Moussa Traoré. Après le coup d’Etat, ces 150 cadres de l’US-RDA dont Modibo Kéita ont été arrêtés, détenus, séquestrés arbitrairement sans jugement. Certains de ces cadres sont morts durant leur détention. Ce qui a constitué des atteintes au droit à la liberté, au droit à l’intégrité physique et psychologique et a eu comme conséquence la stigmatisation, la dislocation des familles, la discrimination et la destruction des biens. Après leur libération, certains ont été interdits pendant 10 ans d’activités politiques. L’Etat malien est incriminé comme l’auteur de ces exactions.

Arrestation et séquestrationde Modibo Kéïta et ses compagnons : le régime du Cmln sur le banc des accusés

Selon Gaoussou Diarra (porte-parole du Collectif des familles victimes du coup d’Etat du 19 novembre 1968), le coup d’Etat du 19 novembre 1968 ayant renversé le régime du président Modibo Kéita a occasionné son arrestation et celle de 150 autres cadres de l’Administration, de ses compagnons et collaborateurs qui étaient civils ou militaires. Ils ont été détenus arbitrairement dans un premier temps à la permanence du parti puis déportés un peu partout dans le pays.

“Pendant leur détention, ils ont subi plusieurs types de violations graves des droits des droits de l’homme tels que les tortures, traitements cruels, inhumains et dégradants, humiliations. Leurs parents ont passé dix ans en détention puis ont été libérés sans être jugés. Après la mort de leurs maris durant leur détention, certaines femmes des victimes ont été privées d’observer leur veuvage.

Modibo Kéïta et ses compagnons qui incarnaient la justice, l’équité, n’ont jamais bénéficié de la présomption d’innocence. Le lendemain du coup d’Etat de 1968, les comptes et les biens des détenus ont été bloqués et saisis. Ce qui a eu des conséquences désastreuses sur la situation des familles des cadres. La responsabilité de l’Etat du Mali est avérée. Après leur libération, ces pères fondateurs de la République du Mali ont été interdits d’activités politiques durant 10 ans. C’est la raison pour laquelle ils ont décidé de participer à cette audience publique afin de partager leur souffrance avec le peuple malien et la communauté internationale, 40 ans plus tard”, a-t-il témoigné.

Fille d’Abass Diawara, Me Mariam Diawara a affirmé que le coup d’Etat de 1968 a détruit la famille de son père dont les enfants n’ont pas pu bénéficier d’éducation. Ses parents, fondateurs du village Bougouwèrè ont été destitués de la chefferie au profit d’autres. Ces parents ont perdu leurs biens dont des champs, des concessions. “Après l’arrestation de mon père, notre famille a vécu toutes sortes de difficultés, comme la précarité, des humiliations, manque d’éducation des enfants” a-t-elle déclaré. Elle a remercié la Cvjr d’avoir donné l’opportunité aux parents des victimes de s’exprimer. Ce qui, à ses dires, permettra de restaurer la dignité de Modibo Kéita et de ses compagnons arrêtés et détenus arbitrairement avec des traitements cruels, dégradants et humiliants. Elle a fait savoir que la méchanceté ne doit pas être remboursée par la méchanceté. Le pardon doit être de rigueur. Elle a invité la Cvjr à penser à soutenir la famille de Modibo Kéïta en restaurant la concession de son père, Daba Kéïta, qui se trouve en ruine. Elle a préconisé le pardon, la paix, la réconciliation.

Dans son témoignage, Aboubacar Sissoko (fils de Bourama Sissoko, Haut commissaire à la jeunesse de l’US-RDA) a remercié la Cvjr pour l’organisation de l’audience publique qui, à ses dires, va permettre aux victimes du coup d’Etat du 19 novembre 1968 de s’exprimer. Selon lui, Modibo Kéïta incarnait la justice, l’équité et aimait la jeunesse malienne dont son éducation qui était le pilier de son régime. Il a fait savoir que son père, durant sa détention, a souffert dans des conditions exécrables. Il a fait savoir que lui et ses 8 frères et sœurs et leur mère aussi ont souffert de l’incarcération de leur père. La famille a été disloquée, dispersée. Après sa libération, Bourama Sissoko et sa famille ont été déportés à Dioïla.

“Peut-on parler de pardon et de réconciliation sans la justice ? Non ! Mais grâce à la Cvjr, les victimes ont eu droit à la parole pour se faire entendre et partager leurs souffrances avec le reste du Mali. Ce qui constitue un soulagement pour nous les victimes. Nous souhaitons que la douloureuse histoire du coup d’Etat du 19 novembre 1968 ne soit pas oubliée. Nous prônons le pardon mais pas l’oubli. Nous avons pardonné aux tortionnaires de nos parents. Et l’idée de réconciliation est de rigueur”, a-t-il estimé. Il a proposé à la Cvjr l’instauration d’une journée de drapeau national, la restitution des biens des compagnons de Modibo Kéita, la poursuite de la réconciliation et la réhabilitation des dirigeants de l’US-RDA et la réparation des torts subis.

Pour Ousmane Oumarou Sidibé (président de la Cvjr), le récit des victimes est pertinent et il est un cas emblématique dans l’histoire du Mali. Ils sont motivés et déterminés. Les messages peuvent être utiles pour la jeune génération.

Des cas de massacres de la part des groupes armés non identifiés

Dans son témoignage, Amidi Agkanine (éleveur à Gao) a fait savoir qu’il a été victime d’atteinte au droit à la vie de la part des groupes armés non identifiés. Il a expliqué que son campement a été attaqué par un groupe armé en 2017. Et les assaillants n’ont épargné que trois vieilles femmes. A son retour au village, lui et les 3 vieilles se sont débrouillés pour enterrer les corps. Dans l’attaque, il a perdu son père et 4 frères de lait. Cet acte ignoble a provoqué le déplacement forcé de la victime qui souhaite que son campement soit réhabilité, que justice soit faite afin que de tels actes ne se reproduisent plus.

Des cas de disparition forcée

Le 3e témoignage est venu de deux personnes qui ont gardé l’anonymat pour des raisons de sécurité. Les parents de ces victimes ont été objets de disparition forcée dans le cercle de Koro (Mopti) de la part des groupes armés djihadistes. Ce qui a comme conséquence des pertes de vies humaines et matérielles, pillages, enrôlements forcés d’enfants de moins de 13 ans, etc. En effet, ils ont expliqué que le village de Yoro dans le cercle de Bankass a été attaqué le 17 juin 2019 par les groupes armés djihadistes causant la mort de 95 personnes dont 15 membres de la famille des anonymes. Cette attaque a engendré des conséquences énormes pour le village : des greniers et moyens de déplacement ont été brûlés ; les édifices de bases ont été pillés et brûlés ; le barrage, les puits à grand diamètre et les châteaux d’eau ont été sabotés.

Tous les animaux ont été emportés dans leur retrait. Ce sont des actes inhumains qui dénaturent l’humanité tout entière et dépassent l’entendement. Les villageois ont passé 4 mois sans dormir assez et pendant lesquels il y avait tout le temps des attaques systématiques puis sporadiques. Ces djihadistes sont toujours présents dans le village et les femmes sont à leur merci. Ce qui a provoqué beaucoup de divorces. Les habitants du village se demandent souvent s’ils font partie du Mali ? Leur vœu le plus ardent aujourd’hui est le renforcement de la sécurité, la réhabilitation des points d’eau, la réouverture des classes et le déminage des voies d’accès.

Ousmane Oumarou Sidibé a trouvé le récit pertinent et pathétique.

Des cas d’atteintes au droit à la vie

A leur comparution à l’audience, Fousseyni Diallo (éleveur, conseiller du chef de village de Koulogon-Peuhl à Mopti) et Binta Dembélé (ménagère) ont parlé des atteintes dont ils ont été victimes lors de l’attaque meurtrière de leur village par des Donso. Ce qui a eu conséquence des pertes en vies humaines, pillages, déplacements forcés, etc. Ils ont expliqué que leur village, Koulogon-Peulh (à Mopti) fut attaqué le 1er janvier 2019 par les Donso. Cette attaque a coûté la vie à 45 personnes dont 15 membres de la famille de Fousseyni Diallo. Trois ans après cette attaque horrible, le village a reçu une délégation de haut niveau conduite par le président de la République de l’époque qui est partie se recueillir sur la tombe des personnes assassinées.

Le Président avait instruit au chef d’état major général de l’armée de prendre des dispositions pour sécuriser le village. Et en application de cette instruction, des militaires sont restés au village pendant 7 mois. Après leur départ, les assaillants sont retournés pour saccager tout ce qui restait comme biens matériels. Le baptême d’un nouveau-né devrait avoir lieu ce 1er janvier 2019, mais malheureusement, ce baptême n’a plus eu lieu car ce bébé a été calciné au cours de la même attaque. Suite à cela, certaines familles ont été obligées de quitter le village avant de se retrouver dans des situations de précarité.

Pour le président Ousmane Oumarou Sidibé, ce récit est pertinent et il est un cas très connu d’atteintes au droit à la vie.

Cas de disparition forcée

Le 5e témoignage est venu de Korotoumou Sangaré (28 ans, aide-soignante à Ségou) dont la maman a été enlevée par des hommes armés en 2010. Dans son témoignage, elle a fait savoir que sa mère a été enlevée à Gatji, commune de Youarou (Mopti), séquestrée et mariée de force parce que tout simplement elle était belle. Ce qui a comme conséquence la stigmatisation, l’humiliation, le déplacement forcé, etc. Elle a raconté, en pleurant, qu’en 2012, un lundi vers 11 heures, des hommes armés sont venus enlever sa mère à cause de sa beauté physique pour la remarier de force. C’est ainsi qu’elle et ses frères ont été obligés de quitter le village pour Niono à cause de la stigmatisation. Une année après, la maman les a trouvés à Niono très “tripotée” et méconnaissable. Depuis lors, la mère n’avait plus retrouvé une bonne santé, elle était tout le temps malade jusqu’à son décès. C’est son mari qui a pris ses frères et elle-même en charge. Elle a fait savoir qu’elle ne souhaite pas que de tels actes arrivent à une autre femme dans le monde.

Le témoignage de cette victime était très pathétique. Elle a raconté son récit avec beaucoup de peine.

Cas d’atteinte au droit à la vie : les FAMa en cause

Sixième à comparaître, Abdoulaye Yattassaye (47 ans, cultivateur, éleveur et commerçant à Niono – Ségou) a témoigné sur l’enlèvement et l’exécution sommaire et extrajudiciaire de son oncle par les Forces armées et de sécurité.

Un cas d’atteinte au droit à la vie. Ce qui a eu comme conséquences : faillite de la société de son oncle, chômage des employés, remboursements des dettes, biens du défunt saisis par les banques, perte de notoriété, etc.

En effet, il a expliqué que suite à un différend survenu au sein du Collectif des éleveurs de Niono, son oncle, Ousmane Yattassaye, a été arrêté par la gendarmerie de Niono. Cette interpellation lui a coûté la vie car des hommes armés, en tenue militaire, sont venus le chercher dans la cour de la gendarmerie pour l’emmener vers une destination inconnue. Au cours de leurs recherches, ils ont été informés par un berger que l’oncle a été tué et enterré derrière la résidence du Commandant de Brigade. Grâce aux contacts, une délégation spéciale du ministère de la Justice a quitté Bamako pour Niono afin de procéder à l’inspection et l’exhumation du corps. Ce qui leur a permis de trouver le corps dans le lieu indiqué. Depuis ce jour jusqu’à la date d’aujourd’hui, le dossier est bloqué au niveau du Tribunal de la commune III du district de Bamako. Ils ont aussi saisi le Médiateur de la République à 3 reprises sans suite favorable. Ils veulent savoir ce qui s’est passé et pourquoi Ousmane Yattassaye a été tué.

Arrestation et détention arbitraires accompagnées de tortures, traitements inhumains et dégradants de la part des FAMas

La 7e audience concernait Assagaidou Adama Touré (cultivateur et imam à Gao) qui a été victime d’arrestation et détention arbitraires accompagnées de tortures, traitements inhumains et dégradants de la part des Forces armées et de sécurité du Mali (Famas). Ce qui a comme conséquences : des séquelles physiques, traumatismes et perte de mémoire, etc. En effet, il a déclaré que, par amalgame, il été arrêtée par l’Armée malienne en février 2013 à Gao. Ils ont fouillé toute sa maison et saccagé beaucoup de choses croyant qu’il était membre du Mujao.

La victime a été ligotée, les mains dans le dos avec les yeux bandés et conduite dans le camp 2 de l’armée à Gao où elle était soumise à un interrogatoire sévère. Les militaires l’ont torturé, humilié, avant de l’envoyer à la Gendarmerie de Gao. Là encore, c’était le même interrogatoire. La victime a été privée de nourriture apportée par sa propre famille et enchaînée avec un autre détenu. Trois jours après, la victime a été libérée. Mais ce qui l’a le plus touché, c’est cette humiliation subie, et de la part de l’Armée de son propre pays.

Disparition forcée de la part des Famas

Le 8e témoignage est venu de Mohamed Yahia Ouldhasni (entrepreneur à Tombouctou dont le père a été victime de disparition forcée de la part des FAMas. Conséquences : incertitude sur le sort de son père, déplacement forcé, traumatisme. Il a informé que, le 12 mai 1991, son père a été enlevé par l’Armée malienne qui l’a emmené vers une destination inconnue. Son père, qui était le seul soutien de la famille, a laissé dernière lui deux femmes et 5 enfants. Et sa disparition les a beaucoup impactés. C’est ainsi que la famille a quitté Tombouctou par peur de représailles depuis cette violation et leurs mères ne veulent plus y retourner. La famille veut savoir où se trouve la tombe de leur père et souhaite que les coupables soient punis.

Cas d’assassinat

Dans son témoignage pour la 9e audience, Alhousseyni Diaby (enseignant à Macina) a fait savoir que son frère jumeau a été assassiné le 3 décembre 2011 à Kidal dans sa maison par 3 hommes armés et enturbannés. Les assaillants l’ont d’abord assommé, avant de vider leur arme sur lui. Il a rendu l’âme dans un bain de sang. Depuis ce jour, Alhousseyni Diaby vit le cauchemar et souffre de traumatismes psychologiques. Il a le dégoût de la vie, s’isole permanemment et garde toujours la chemise maculée du sang de son frère. Selon le dernier vœu de son père, il voudrait savoir qui a tué son frère et pourquoi. Il espère une justice sur le cas de son frère pour favoriser le pardon, la paix, l’entente et la réconciliation. Il a appelé les autorités maliennes à veiller sur la sécurité des populations meurtries.

Arrestation, détention arbitrairement et tortures

Dans son témoignage, Maguine Agertane (agent de santé à TinEssako – Kidal) a fait savoir que 16 de ses parents dont son père ont été arrêtés, détenus arbitrairement et torturés avec des traitements cruels et humiliants. En effet, il a expliqué que durant les évènements de 1990, l’Armée malienne a arrêté 16 personnes par amalgame à TinEssako dont son père soi-disant qu’ils sont les complices des rebelles. Ils ont été bastonnés, maltraités et humiliés pendant 6 jours. Il insiste que cela a laissé des séquelles physiques et psychologiques sur le corps de son père et l’a poussé à quitter le site pour aller s’installer ailleurs. Certains ont été exécutés sommairement. Il veut que l’amalgame cesse, la violation soit reconnue et que l’Etat présente des excuses aux victimes. II a remercié la Cvjr pour l’initiative de l’audience publique qui est en train de susciter de l’espoir chez les victimes. “Pour la paix et la réconciliation, il est souhaitable que les coupables aillent chez les victimes pour reconnaître leur tort afin d’être pardonnés”, a-t-il suggéré.

Cas pathétique d’atteinte à la vie

Dans son témoignage, Awa Doumbia (commerçante, veuve et mère de famille à Go) a raconté que sa fille a été victime d’atteinte au droit à la vie. En effet, elle a été une victime collatérale d’un obus qui a explosé à Gao le 15 avril 2015. Les fragments de cet obus ont touché sa fille qui se trouvait sur le toit de la maison en train de réviser ses leçons pour préparer un examen. Suite à cela, sa fille a été évacuée à l’hôpital de Gao et malheureusement ses membres inférieurs ont été coupés. Cette dernière n’a pas pu supporter l’opération et est finalement décédée quelques semaines après.

Elle a sollicité l’aide de la Cvjr pour pouvoir se débrouiller à nourrir et assurer l’éducation de ses petits enfants.

Cas d’exécution extrajudiciaire et de tortures

Durant son témoignage, Abdoul Karim Maïga (cultivateur à Tombouctou) dont deux oncles ont été victimes d’exécution extrajudiciaire et de tortures a exposé qu’en 2016 il a perdu deux oncles à Kanaou (Tombouctou). L’un a été assassiné et l’autre enterré vivant par des hommes enturbannés à cause d’un différend autour d’une bourgoutière qu’ils exploitaient depuis le temps de leurs ancêtres. C’est un groupe de 5 à 7 personnes qui ont commis ce forfait. La famille s’est résignée et s’en est remise à Dieu. Elle prie aussi pour que la paix revienne au Mali.

Atteintes au droit à la vie de la part des groupes armés islamistes

Dans son témoignage, Amidou Guindo (cultivateur à Bankass) a expliqué que son village a été attaqué par les groupes armés en 2019 causant la mort de 6 personnes dont son père et son fils. Les assaillants ont pillé et brûlé des greniers et plus de 60 motos. Ils ont emporté tous les animaux avec eux. Tous les habitants ont quitté le village pour aller à Bankass qui se trouve à 150 Km du village. A ses dires, les villageois souhaitent que la sécurité soit renforcée afin qu’ils puissent retourner dans leur village. Ils ont besoin d’aide et de soutien matériel.

Après ces témoignages, le président de la Cvjr, Ousmane Oumarou Sidibé, a promis que les déclarations seront formulées dans une recommandation qui sera transmise aux autorités compétentes.

Siaka DOUMBIA

OUSMANE OUMAROU SIDIBé (PRéSIDENT DE LA CVJR) :

“L’audience publique est un cercle de solidarité construit autour du récit”

A son entendement, les trois thèmes qui ont fait l’objet de témoignages illustrent, à suffisance, la gravité des violations des droits de l’homme et leurs conséquences sur les victimes et leurs proches, ainsi que sur le vivre ensemble.

l’ouverture de la 4e audience publique de la Commission vérité justice et réconciliation (Cvjr), le président de cette commission, Ousmane Oumarou Sidibé, a tenu à rappeler le contexte de la tenue de la 4e audience.

“Après les trois premières audiences publiques, de nombreuses victimes ont témoigné auprès de la Cvjr, de leur volonté de comparaitre sur l’un ou l’autre des thèmes déjà abordés afin de partager avec la nation malienne leur vécu, mais toujours dans un esprit de pardon et de réconciliation nationale. C’est la raison pour laquelle l’assemblée plénière de la Cvjr a décidé de consacrer la 4e séance aux trois premiers thèmes passés à savoir, “Les atteintes au droit à la liberté (arrestations, détentions, enlèvements, séquestrations),” Les atteintes au droit à la vie et à l’intégrité physique (assassinats, meurtres, tortures, traitements inhumains, cruels et dégradants)” ; “Les disparitions forcées”. Ce faisant, nous nous sommes organisés pour toujours rester dans le cadre des 6 thématiques initialement retenues, en traitant ensemble au cours d’un prochaine session les violences contre les femmes et celles contre les enfants”, a-t-il indiqué.

A son entendement, les trois thèmes qui ont fait l’objet de témoignages illustrent, à suffisance, la gravité des violations des droits de l’homme et leurs conséquences sur les victimes et leurs proches, ainsi que sur le vivre ensemble. Il a rappelé qu’avec la crise que le Mali vit, les atteintes au droit à la liberté (arrestations et détentions arbitraires, enlèvements, et séquestrations) sont devenues récurrentes, avec une tendance inquiétante à leur banalisation.

“Or, quiconque perd sa capacité de décider de sa vie, subit la perte d’une dignité fondamentale et on doit impérativement l’aider à la récupérer. A cet égard, l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme dispose que ” tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne”, a-t-il souligné.

Il a reconnu qu’à des degrés divers, chacune des crises que notre pays a connues a été marquée par des atteintes au droit à la vie et à l’intégrité physique (assassinats, meurtres, tortures, traitements inhumains, cruels et dégradants). Les assassinats et meurtres, a-t-il rappelé, sont des crimes graves, mais les traitements cruels, inhumains ou dégradants sont également considérés comme des crimes au regard du droit international humanitaire et de notre législation nationale. Aussi, la disparition forcée est un crime qui met en évidence l’importance de la vérité comme le chemin le plus sûr pour parvenir à l’apaisement des cœurs et à la réconciliation nationale car l’essence du crime de disparition forcée étant le déni d’information et le mensonge, les proches des victimes ne peuvent avoir une paix intérieure que lorsque leur sort est révélé, lorsque la vérité arrive à briser le manteau du mensonge.

Il a fait savoir que les audiences publiques ne sont pas des audiences judiciaires et que la Cvjr n’est pas un tribunal. D’après lui, la Cvjr ne cherche à établir ni la culpabilité, ni l’innocence des auteurs présumés qui est le travail de la justice malienne.

“Aux audiences publiques, seules les victimes seront entendues. La Cvjr leur offre un cadre digne et sécurisé où elles pourront raconter les souffrances vécues. L’audience publique est un espace d’écoute respectueuse, où les victimes ont un rôle de premier plan. C´est un cercle de solidarité, construit autour du récit. Elle permet surtout de rendre aux victimes leur dignité, d’intégrer leurs récits à la mémoire nationale et de faciliter un début de guérison. Il s’agit donc d’une contribution concrète à la promotion du dialogue, du pardon, de la réconciliation nationale et de la paix, toutes choses qui sont au cœur des missions assignées à la Transition”, a-t-il signalé.

Auparavant, Mme Fatoumata Touré (représentante des victimes) a remercié la Cvjr pour la tenue des audiences publiques pour entendre les victimes. A ses dires, ces audiences sont très importantes pour les victimes car elles leur accordent l’espace d’expression afin d’apaiser leurs cœurs, de recevoir la reconnaissance aux yeux des autorités et de la population malienne à traverser leurs récits de vie. Au nom de toutes les victimes, elle a réitéré à l’endroit de la Cvjr tout leur engagement et disponibilité à accompagner les audiences en vue d’aboutir à la justice et à la réparation pour combler de nombreuses séquelles émises par les crises et leurs cortèges de violations graves des droits de l’homme.

Siaka DOUMBIA

Source: Aujourd’hui-Mali
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